Phytoprotection 15 septembre 2023

Un champignon qui vit dans le sol se réveille

Après une saison difficile l’an dernier, en raison des virus transmis par les pucerons du soya qui ont affecté sa production de courges, un agriculteur de Saint-Alexis, dans Lanaudière, Mathieu Lavoie, n’est pas au bout de ses peines, en 2023. Cette fois, c’est Phytophthora capsici qui lui donne du fil à retordre, soit un champignon déjà présent dans le sol qui se manifeste avec la chaleur et l’accumulation d’eau stagnante.

« On perd beaucoup de champs qu’on ne récolte pas. Quand tu vois un rond dans tes champs, tu ne touches pas à ça », témoigne celui qui a commencé ses récoltes de courges au début septembre. Ce dernier fait tout en son pouvoir pour éviter la propagation de la maladie fongique. « Je sais que dans la citrouille, ils l’ont difficile. Moi, pour l’instant, à part perdre quelques champs, je remarque que les plants, au lieu de faire trois ou quatre fruits, ils vont en faire un », illustre le producteur pour qui les potentielles pertes sont encore difficiles à quantifier.

Une agronome du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, Isabelle Couture, explique que ce champignon qui provoque de la pourriture s’est beaucoup manifesté cette saison dans les champs de poivrons, d’aubergines et de cucurbitacées, surtout cultivés en sol lourd ou argileux.

Il y en a eu dans plusieurs entreprises et avec beaucoup de pertes associées. Il est tellement agressif. Comme il habite dans le sol, les fongicides ne sont, à toutes fins pratiques, d’aucune utilité. […] Dans les poivrons, c’est comme le feu qui pogne dans ton champ; c’est fou. Ce qui est traître aussi, c’est que tu peux récolter, tout est beau, mais deux jours après, tout est pourri, parce qu’il y a eu infection, et il y a toujours un délai entre l’infection et les symptômes.

Isabelle Couture

L’agronome suggère aux producteurs aux prises avec cette maladie d’aller le moins possible dans les champs infectés. « Quand on a des choses à faire là, il faut y aller en tout dernier. Les roues de tracteurs peuvent transporter des spores [les organismes responsables de la maladie] de ce champignon-là ailleurs. Il faut prendre des mesures pour éviter toute transmission de sol. »

Une gestion serrée à l’entreposage

L’agronome Nadia Surdek prévient les producteurs de carottes, d’oignons, de pommes de terre, de betteraves, de rutabagas et de courges, dont les récoltes ont lieu à l’automne, qu’un contrôle serré à l’entreposage devra être appliqué. « Ce qui est pourri au champ, c’est facile à éliminer parce que c’est déjà pourri, mais tout ce qui est asymptomatique à la récolte présente un risque. Ça peut, après ça, dépérir en entrepôt, affirme-t-elle. Il va falloir rester vigilant, faire un suivi des lots d’entreposage pour limiter les problèmes. »