Environnement 26 avril 2023

Fermes Lortie : Quand les bonnes pratiques deviennent la ligne directrice

Lorsqu’on demande à Émilien Lortie, producteur spécialisé en grandes cultures, ce qu’il retient de sa participation au projet Agriclimat, son constat est aussi simple qu’éloquent. « En fonction du bilan carbone de ma ferme et des changements climatiques à venir, on a réalisé que dans un assez court laps de temps, nos méthodes culturales devront changer. »

Pour l’agriculteur de Saint-Lin-Laurentides, ces conséquences se manifestent déjà sur le terrain. « Avec des printemps plus secs, des étés plus chauds, des automnes pluvieux et des hivers moins enneigés, c’est une toute nouvelle régie, autant pour les cultivars à choisir que pour la manière de les cultiver. Des cultivars et même des espèces de céréales qui autrefois étaient très performants ne le sont tout simplement plus. C’est à croire que ces espèces ne sont plus adaptées à notre climat qui change », observe-t-il.

Une régie qui s’adapte

Machines utilisées pour améliorer la santé des sols et installer des drains afin de favoriser l’égouttement.

Face à ces perspectives troublantes, l’agriculteur a entrepris d’optimiser certains virages déjà amorcés. Imed Hasni, Ph. D. et coordonnateur grandes cultures et conseiller chez Services AgriXpert, accompagne les Fermes Lortie dans cette approche. « M. Lortie a collaboré étroitement à l’élaboration de cette nouvelle démarche pour déterminer les actions les plus appropriées pour son entreprise. J’ai découvert un jeune producteur “allumé”, avec une vision claire, ce qui lui a permis de mettre en place une stratégie axée sur de bonnes pratiques agroenvironnementales », commente M. Hasni. « D’ailleurs, l’analyse du bilan carbone de son entreprise démontre que ses émissions de GES sont inférieures à celles auxquelles on pourrait s’attendre d’une ferme moyenne de grandes cultures au Québec », ajoute le conseiller. 

Parmi ces bonnes pratiques, une réduction des travaux de sol est dans la mire de l’entreprise. « Depuis quelques années, la régie de nos sols se déplace majoritairement vers le travail minimum du sol et le semis direct dans certaines terres aux types de sols plus légers », explique M. Lortie, qui se soucie de préserver l’humidité emmagasinée par les sols au fil des saisons. « Chaque fois qu’on travaille le terrain, ça fait partie des éléments importants qu’on perd. Chaque passage, chaque opération, chaque apport au champ comporte aussi un coût tangible. » Un autre point phare des pratiques culturales de l’entreprise, qui constitue aussi sa ligne directrice, vise à optimiser la santé et les réserves de ses sols. « L’apport en fumier, le semis d’engrais verts après récolte, l’implantation de cultures intercalaires et un drainage efficace, autant en surface qu’en profondeur, sont d’autres éléments qu’on préconise. »

Un exemple de travail réduit du sol : le déchaumage au printemps d’un engrais vert de sarrasin semé après une récolte de soya afin de planter du maïs. 

La rotation, absolument

L’autre pièce maîtresse de cette précieuse ligne directrice est une rotation stratégique avec le blé, le seigle, l’orge, le maïs et le soya. « Après les récoltes de céréales à paille, un engrais vert est semé systématiquement. Ça nous permet d’apporter des amendements de fumier, des corrections de nivelage, de drainage et de ne pas laisser la terre à nu par la suite. Lorsqu’il n’est pas nécessaire de faire des travaux, un trèfle est semé en début de saison, en intercalaire dans les céréales », explique l’agriculteur. « Pour ce qui est du soya, l’approche est de semer du seigle ou du blé d’automne directement après la récolte en semis direct », résume-t-il, notant qu’en règle générale, la récolte de soya se fait dans des conditions
optimales pour l’implantation d’une céréale d’automne. Cette année, ce sera au tour du maïs de partager ses rangs avec le ray-grass, le radis décompacteur et le trèfle en intercalaire.  

« Cet engagement des Fermes Lortie à mettre en œuvre d’autres actions et à les poursuivre dans le futur en fait un acteur clé de la région pour la lutte contre les changements climatiques », souligne Imed Hasni. Pour Émilien Lortie, cette gestion d’entreprise clairement orientée sur l’agriculture durable est aussi une question de respect.

Les sols nous permettent de faire notre métier. Avec la valeur qu’ils ont aujourd’hui, on doit les garder en santé pour les optimiser.

Émilien Lortie, Fermes Lortie
FERMES LORTIE
Représentées par :

Émilien Lortie

Production :

Grandes cultures

Conseiller :

Imed Hasni (AgriXpert)

Partenaire régional Agriclimat :

Dominic Brochu, Fédération de l’UPA de Lanaudière


Qu’en dit la science ?

Les études québécoises démontrent qu’en moyenne, les sols soumis à une régie de travail réduit ont un taux de matière organique supérieur aux sols où le travail est intensif. La situation géographique, l’historique du sol, sa texture et son taux initial de matière organique peuvent cependant limiter l’impact de la réduction du travail du sol sur le taux de matière organique.