Économie 13 octobre 2023

Forces et freins à la croissance des entreprises agricoles

La gestion d’une entreprise familiale, un modèle qui prédomine dans le secteur agricole, comporte plusieurs freins à la croissance, constatent deux experts en gestion. Mais ce modèle a aussi des forces qui sont des atouts importants, sur le plan tant local qu’international, soulignent-ils.

Fanny Lepage

Parmi ces freins, Fanny Lepage, professeure en gestion et gouvernance des entreprises agricoles et agroalimentaires à l’Université Laval, souligne notamment les conflits émotionnels entre les membres de la famille, les choix plus conservateurs quant à la croissance de l’entreprise, ou l’ombre du fondateur, qui ajoute un poids sur les épaules de la relève et impose un moule difficile à casser. « En contrepartie, la famille a aussi le souhait que l’entreprise perdure dans le temps, car elle a la volonté de transmettre aux autres générations une entreprise prospère » précise-t-elle. Claude Ananou, professeur au Département de management à HEC Montréal, affirme qu’il s’agit là d’un avantage important du point de vue des investisseurs et des clients. « C’est d’ailleurs une grande force de l’entreprise familiale qui est même reconnue en bourse, puisque les décisions sont souvent prises pour la longévité de l’entreprise. On pourrait comparer ça à un whisky vieilli de 20-30 ans plutôt qu’un whisky de 2 ou 3 ans. C’est un peu l’image que ça donne de l’entreprise familiale. Même dans la gestion, on ne dit jamais «ça passe ou ça casse». Quand on a 15 employés qui proviennent de la famille, il y a une plus grande pression face aux mauvaises décisions », explique-t-il. 

Claude Ananou

Les relations humaines, aussi appelées le capital social, sont une autre force des entreprises familiales, car les liens entre les membres de la famille prédominent et se répercutent sur la relation avec les employés, les partenaires d’affaires et les clients.

C’est ce qu’on appelle le stewardship. Il y a une affinité qui se crée envers les clients, qui ont parfois même connu les dirigeants alors qu’ils étaient enfants.

Claude Ananou

Or, cet atout peut aussi jouer en défaveur du recrutement. « Parce que quand les postes importants à la direction sont occupés par les membres de la famille, la main-d’œuvre qualifiée peut se sentir bloquée dans sa progression et aussi voir cela comme une forme de favoritisme »,
mentionne-t-il.