Porcs 15 janvier 2024

L’industrie porcine face au défi de la carboneutralité

Les embûches sont nombreuses pour que l’industrie porcine atteigne la carboneutralité d’ici 2050, tel que le recommande l’Accord de Paris pour limiter le réchauffement planétaire.

Un objectif que Marco Dufresne, vice-président des services techniques, des projets spéciaux et du développement durable chez Olymel, qualifie de « très agressif, puisqu’il y a encore de nombreuses entreprises qui ne sont pas là où elles devraient être ».

Chez Olymel, qui est la principale entreprise de transformation de porcs de la province, et qui possède également des élevages porcins, la plus importante source d’émission de gaz à effet de serre provient des hydrocarbures utilisés pour le transport des animaux et de la viande, que ce soit par camion, bateau ou avion.

Marco Dufresne

Or, la conversion complète de la flotte de camions vers l’électricité n’est pas envisageable avant une dizaine d’années, spécifie M. Dufresne.

« Hydro-Québec n’a pas l’électricité qu’il faut pour suffire à la demande des agriculteurs, des transformateurs et des distributeurs pour une flotte de camions industriels. Ça, c’est l’un des premiers enjeux, car il faut se rabattre sur d’autres technologies, et il n’y en a pas tant que ça », a-t-il confié à La Terre dans le cadre d’une conférence sur le même thème qu’il a prononcé au PorcShow, en novembre dernier.

Réduire le méthane provenant des élevages

La deuxième plus grande source d’émission provient des élevages, avec, d’une part, le méthane que les porcs produisent en respirant.

Pour ça, il n’existe pas encore de technologie qui permet de changer la biologie de l’animal afin qu’ils n’émettent plus de méthane. Il va falloir dealer avec le fait qu’on va toujours être un émetteur de méthane, à moins de ne plus élever de porcs.

Marco Dufresne, vice-président des services techniques, des projets spéciaux et du développement durable chez Olymel

« Pour atteindre la carboneutralité, l’industrie devra donc se tourner vers des crédits compensatoires, comme la plantation d’arbres, la création d’espaces verts, ou avec d’autres technologies capables de capturer du carbone dans l’espace », donne-t-il en exemple. 

Quant au lisier, autre source de méthane provenant des élevages, des technologies comme la biométhanisation existent pour le convertir en gaz naturel renouvelable, lequel peut ensuite être réutilisé sur le site de production pour créer une économie circulaire et ainsi atteindre la carboneutralité. « Or, une usine de biométhanisation, c’est très technologique et dispendieux.  

Aujourd’hui, plusieurs éleveurs vont décider de faire de l’épandage au champ, parce qu’économiquement parlant, c’est plus viable que d’aller en biométhanisation », déplore-t-il. 

Le défi reste donc de taille pour que l’industrie soit carboneutre d’ici 2050, résume M. Dufresne, qui estime que si la réglementation était déjà en place tel que le propose l’Accord de Paris, plusieurs entreprises devraient faire faillite, faute de solutions possibles et rentables. « Le développement technologique pourra toutefois nous aider dans les prochaines années », ajoute-t-il sur une note plus optimiste. 

Actuellement, au Québec, le bilan carbone par bâtiment est volontaire, mais il pourrait éventuellement devenir obligatoire pour les grandes entreprises, puis pour les plus petites par la suite, anticipe M. Dufresne.