Pommes de terre 27 mars 2024

Une approche innovante mise au point au CIEL pour le traitement de la cicadelle de la pomme de terre

La cicadelle de la pomme de terre, considérée comme un ravageur secondaire, peut néanmoins causer bien des dommages aux cultures. La difficulté, c’est qu’il est très difficile de déceler la présence de cet insecte en raison de sa petite taille et du fait qu’il s’envole facilement.

Pour un dépistage plus rapide, le Carrefour industriel et expérimental de Lanaudière (CIEL) a mené des recherches entre 2019 et 2021 pour mettre à l’épreuve des seuils ­différents de captures de la cicadelle chez des producteurs de plusieurs régions, notamment L’Assomption, Lanaudière et le Bas-Saint-Laurent.

« On a utilisé des pièges collants jaunes pour établir un seuil d’intervention économiquement viable », explique Sébastien Martinez, chercheur au CIEL.

Le premier volet de l’étude, mené en parcelles expérimentales avec le cultivar Goldrush, a permis de déterminer que le seuil de 25 captures par piège et par semaine permettait d’obtenir un bon équilibre entre la réduction du nombre de traitements aux insecticides et la protection des plants. « Avec ce seuil, le producteur peut diminuer le nombre d’applications, de deux à cinq traitements. Les dommages aux plants seraient équivalents que s’il traitait chaque semaine », précise le chercheur.  

Faciliter la prise de décision

Une fois cela établi, une autre question s’est alors posée pour les producteurs : combien de pièges fallait-il par champ? Un deuxième volet de recherche a été déployé chez quatre producteurs.

On a installé de 20 à 37 pièges collants aux 20, 30 et 50 mètres selon les régions ou la taille des champs. Grâce à des calculs mathématiques complexes faits par ordinateur, il a été déterminé que six à huit pièges par champ, peu importe sa superficie, permettaient de prendre la bonne décision de traiter ou pas dans plus de 85 % des cas. Une plus grande densité de pièges n’était pas plus efficace.

Sébastien Martinez
Pour partager les résultats de ces essais, le CIEL organise des journées de démonstration rassemblant des producteurs désirant en apprendre plus sur de nouvelles pratiques.

Lutte plus écologique contre la brûlure hâtive

Les chercheurs du CIEL ont aussi mené des recherches pour trouver des solutions plus écologiques au traitement de la brûlure de la pomme de terre, une maladie fongique qui peut entraîner des pertes de rendement considérables. Ils ont testé trois stratégies de lutte intégrée : l’alternance de biofongicides avec des fongicides chimiques pénétrants (à profil environnemental et sanitaire favorable), l’utilisation exclusive de fongicides chimiques pénétrants, et le recours à des produits de contact aux profils sanitaires moins avantageux.

L’utilisation de fongicides pénétrants a offert la meilleure protection du feuillage, quelle que soit la variété de pomme de terre cultivée (Envol, Goldrush, Red Maria et Russet Burbank). Les chercheurs ont aussi pu établir qu’il est préférable de commencer les traitements à la fermeture des rangs. « On peut retarder la première application de deux ou trois semaines, soit après la floraison », explique Sébastien Martinez. Une pratique qui permet de réduire les coûts et les risques pour la santé par rapport aux méthodes conventionnelles.

Un projet qui a fait ses preuves

Ce ne sont que quelques-unes des recherches menées par les chercheurs du CIEL qui font l’objet de démonstration dans le cadre du ­projet de vitrine de régie à moindres risques pour la pomme de terre. Actuellement, 11 producteurs de plusieurs régions du Québec expérimentent différentes stratégies afin de réduire l’usage des pesticides sans compromettre la qualité des cultures ni les rendements, à un coût comparable. « Dans une portion de leurs champs, les producteurs appliquent la régie conventionnelle et, à côté, on utilise des méthodes alternatives », explique Sébastien Martinez, chercheur au CIEL. 

Pour partager les résultats de ces essais, le CIEL organise des journées de démonstration rassemblant des producteurs désirant en apprendre plus sur de nouvelles pratiques.

On a environ 80 participants par journée, précise-t-il. Considérant que ces visites se font au cœur de l’été alors que les producteurs sont très occupés, on peut dire que c’est une belle réussite. Les participants peuvent s’informer auprès du producteur des résultats obtenus, des avantages et des inconvénients des méthodes mises à l’essai.

Sébastien Martinez

Soutenu par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) depuis 2019, le projet des vitrines de régie à moindre risque prend fin en 2024. « On ne sait pas encore s’il sera renouvelé dans sa forme actuelle ou une autre, affirme Sébastien Martinez. 

C’est sûr que l’on aimerait poursuivre l’expérience. On s’est aperçu qu’un accompagnement de deux ou trois ans pour faire des changements, ce n’est pas assez parce que chaque saison est différente en raison des conditions climatiques variables. Un accompagnement de cinq ans serait préférable. »