Foin de commerce : une première coupe interminable

La pluie incessante qui tombe depuis le début juillet dans la plupart des régions du Québec donne des maux de tête aux producteurs de foin sec destiné au commerce. Devant l’incapacité de se rendre au champ pour récolter en raison du sol qui n’a pas le temps de sécher, plusieurs n’avaient toujours pas terminé leur première coupe, à la mi-août.

Le producteur Dany Therrien affirme avoir pressé seulement 2 jours sur 45 depuis le début juillet. Photo : Gracieuseté de Dany Therrien

« On est emprisonnés, on ne peut rien faire », lance avec découragement Dany Therrien, qui cultive 320 hectares près de Sherbrooke, en Estrie, avec une entreprise partenaire. Le 16 août, la moitié de sa première coupe restait à faire. L’autre moitié avait été réalisée avant la fin juin. Plus de 600 millimètres de pluie sont tombés dans son coin par la suite. 

« On n’aura pas de deuxième coupe [dans les champs qui n’ont pas été faits encore], on n’aura pas le temps. En 45 jours, en juillet et en août, on a pressé deux jours. On n’a eu aucune séquence de 48 h sans pluie. Je n’avais jamais vu ça », témoigne celui qui garde toutefois espoir de terminer sa première coupe d’ici le 15 octobre. 

Même son de cloche du côté de Fernand Halde, un producteur de céréales et de foin de commerce de Saint-Marc-sur-Richelieu, en Montérégie. « On a fait 30 acres de foin sur 170 acres. On a 140 acres à récolter encore et on est le 15 août », s’étonne-t-il, appréhendant que la récolte tardive entraîne une baisse de qualité du produit. « On n’est pas capables de rentrer dans les champs. Ça prend au moins trois jours de beau temps consécutif pour récolter 15 acres, mais il pleut tout le temps. »

À Saint-François-Xavier-de-Brompton, en Estrie, Aimé Rivard affirme n’avoir rien pu faire de tout le mois de juillet dans les champs où il recueille du foin sec qu’il commercialise. « Il reste 150 acres de foin à faire sur 400. On est encore à la première coupe. » Celui qui est aussi producteur laitier est parvenu, en revanche, à faire de l’ensilage pour ses vaches.

Alphonse Pittet

Le président du Conseil québécois des plantes fourragères, Alphonse Pittet, explique que la production de foin de commerce, qui est vendu sec, nécessite plus d’opérations au champ que celle de fourrage pour l’ensilage. Une fenêtre de beau temps plus grande est requise pour la récolte qui doit se faire au sec. 

« C’est une année à oublier complètement pour les producteurs de foin de commerce, qui sont particulièrement affectés. Pour plusieurs, surtout en Estrie où se trouvent les plus grandes superficies de foin spécialisé pour le commerce, la deuxième coupe est condamnée. Pour le Bas-Saint-Laurent, une autre grande région productrice, on a moins d’info, mais ça ne semble pas mieux », fait-il valoir. 

Dans des régions telles que la Montérégie et le Centre-du-Québec, dit-il, où l’on retrouve beaucoup de producteurs de lait qui font surtout de l’ensilage, la situation est moins alarmante.

« Les producteurs de lait ont pu faire leur première coupe tôt en juin, dans des conditions plus normales. Pour la deuxième coupe, il y a eu quelques fenêtres au début juillet. Ce sont des régions qui s’en sont mieux tirées », explique celui qui est lui-même producteur laitier à Saint-Tite, en Mauricie.

Des stocks de foin qui vont descendre

L’an dernier, une abondance de foin de commerce avait permis aux producteurs d’entreposer beaucoup de surplus qui risquent d’être écoulés cette année en raison d’une faible récolte, croit David Normandin, dont l’entreprise de Saint-Césaire, en Montérégie, vend de grands volumes en Amérique du Nord. « Il y a beaucoup de gens qui vont écouler les restants de l’année dernière. Il y aura peut-être une pénurie dans certaines régions, mais on garde espoir de pouvoir en faire encore d’ici la fin octobre », dit-il.