Lait 21 février 2024

Des fromageries de moyenne taille dans la cour des grands

Le fonds d’investissement qu’Ottawa a créé pour aider les transformateurs de produits sous gestion de l’offre à faire face aux perturbations de marché découlant des accords commerciaux profite à des fromageries de moyenne taille du Québec. Deux d’entre elles s’estiment plus compétitives que jamais par rapport aux gros joueurs de l’industrie, après avoir bénéficié de sommes importantes pour mener à bien leur projet d’acquisition de technologies de pointe.

« Nous, ça nous a permis d’acquérir des technologies que les gros utilisent depuis des années, mais qui sont moins accessibles pour les plus petits », témoigne Thomas Paradis-Levasseur, copropriétaire de la Fromagerie La Chaudière, située à Lac-Mégantic, en Estrie.

Son entreprise a obtenu 5 M$ d’Agriculture et Agroalimentaire Canada pour l’ajout d’équipements qui lui permettront de valoriser l’eau et la protéine de lactosérum restantes une fois la matière grasse extraite du lait pour la fabrication de fromages. La réalisation du projet de plus de 10 M$ est en cours et se poursuivra jusqu’en mars 2025. 

On va pouvoir revaloriser chez nous la protéine concentrée au lieu de la vendre à Lactalis, parce qu’on va être capables, maintenant, de lui donner le traitement requis pour la réutiliser.

Thomas Paradis-Levasseur, copropriétaire de la Fromagerie La Chaudière

La protéine qu’il pourra réinjecter dans ses procédés lui permettra de produire plus de fromage avec autant de lait, dit-il. « On revalorise au maximum, ce qui fait qu’au lieu de faire 10 kilos de fromages pour 100 litres de lait, on va en faire 12 », ajoute celui dont l’entreprise distribue son fromage en grains et en bloc dans plusieurs points de vente à l’échelle de la province.

La Fromagerie La Chaudière distribue son fromage en grains et en bloc dans plusieurs points de vente à l’échelle de la province. Photo : Fromagerie La Chaudière

Concurrence féroce dans la mozzarella

Dave St-Laurent, copropriétaire de la Fromagerie St-Laurent, à Saint-Bruno, au Lac-Saint-Jean, affirme que son système de refroidissement dernier cri et de récupération d’énergie lui permettra de mieux se positionner sur le marché très compétitif du fromage mozzarella, largement dominé par les gros transformateurs.  

« On réduit de presque deux tiers la consommation de gaz naturel, électrique, notre consommation thermique. Ça réduit de beaucoup nos coûts de production énergétique. On est extrêmement compétitifs maintenant par rapport aux gros dans la production de mozzarella », affirme celui qui a reçu une subvention fédérale de 1,7 M$ pour la réalisation de son projet de 4,7 M$. 

L’étape du refroidissement du fromage, particulièrement énergivore, explique-t-il, se fait beaucoup plus efficacement, ce qui confère un énorme gain en productivité. « Présentement, on est capables de produire au maximum 6 200 kilos de mozzarella par jour, mais les équipements sont tellement performants qu’ils ont le potentiel de tripler à quadrupler cette production-là. On veut, par contre, y aller progressivement pour augmenter la production », dit-il, précisant que le nouveau système devrait être complètement fonctionnel d’ici mars.

À ce jour, 59 projets au Canada, dont 18 au Québec, ont été approuvés par le Fonds d’investissement pour la transformation des produits sous la gestion de l’offre, un programme de six ans lancé en 2022.

Des améliorations vertes

Thomas Paradis-Levasseur, copropriétaire de la Fromagerie La Chaudière, se dit particulièrement fier de l’un des équipements ajoutés à son usine, qui permet de recycler l’eau extraite du lactosérum, soit le résidu liquide généré par la production fromagère. « Le lait, c’est 90 % d’eau. Notre nouveau système va nous permettre de récupérer 20 millions de litres d’eau par année, qu’on va rendre potable et qu’on va réutiliser dans nos opérations de lavage », affirme-t-il, heureux d’ainsi pouvoir limiter la consommation d’eau provenant de l’aqueduc municipal.

Dave St-Laurent, copropriétaire de la Fromagerie St-Laurent, indique que ses nouveaux équipements lui permettent de réduire son empreinte environnementale non seulement par la récupération de l’eau, mais aussi de la chaleur qui émane du procédé de fabrication de fromage. « La chaleur qu’on produit, au lieu de la sortir dans l’atmosphère, on la récupère pour chauffer de l’eau. On se retrouve avec des volumes importants d’eau chaude, presque bouillante, qu’on réutilise pour d’autres opérations dans l’usine. Ça nous permet de réduire l’utilisation de la vapeur pour chauffer divers éléments, et par le fait même, ça diminue l’utilisation de gaz naturel », explique-t-il.