Grandes cultures 6 septembre 2023

Une guêpe parasitoïde alliée dans le contrôle de la cécidomyie du chou-fleur dans le canola 

La cécidomyie du chou-fleur (CCF), Contarinia nasturtii, est un petit moucheron de couleur brun clair originaire d’Europe et d’Asie, dont la larve se développe dans les plantes crucifères. Signalée pour la première fois en Amérique du Nord en 2000 dans des fermes maraîchères de brassicacées en Ontario, la CCF s’est depuis répandue sur tout le territoire québécois. Elle est maintenant considérée comme un des principaux ravageurs du canola et les pertes de rendement qu’elle occasionne en cas de forte infestation sont susceptibles de mettre en péril l’intérêt pour cette culture au Québec.

Les adultes de CCF émergent au printemps et disposent d’un à trois jours pour s’accoupler. La femelle fécondée dépose ses œufs près des boutons floraux, des bourgeons terminaux ou des pétioles des jeunes feuilles. Les œufs éclosent en quelques jours et les jeunes larves commencent à se nourrir à l’intérieur des bourgeons. Les dommages apparaissent de 5 à 10 jours plus tard sous forme de points de croissance violacés et rabougris, puis par la déformation des jeunes tiges et des boutons floraux entraînant la formation de bouquets de siliques en fin de saison. Ces dégâts peuvent compromettre la croissance des plants et même entraîner la mort des points de croissance. À la fin de son développement, la larve se laisse tomber au sol où elle va s’enfoncer pour se métamorphoser en pupe avant d’émerger en adulte quelques jours plus tard. Deux à cinq générations peuvent ainsi être observées au cours de la saison. À l’automne, les larves de la dernière génération entrent en diapause sous forme de pupe lui permettant de survivre durant l’hiver et de pouvoir recommencer un nouveau cycle de vie l’année suivante.

Un parasitoïde des larves de CCF 

En 2016, une petite guêpe parasitoïde, Synopeas myles, a été découverte au Québec et en Ontario. La femelle de cet insecte pond ses œufs dans les larves de CCF et les jeunes larves de guêpe se développent ensuite en consommant leur hôte de l’intérieur avant d’émerger sous sa forme adulte. Synopeas myles est une des principales espèces de guêpes parasitoïdes des larves de CCF en Europe. Son taux de parasitisme serait cependant relativement faible (2,9 %) et sa gamme d’hôtes semble assez large, comptant plusieurs espèces de Cecidomyiidae des genres Contarinia, Dasineura et Sitodiplosis. Au Canada, en revanche, très peu d’information existe sur les populations de cette guêpe.

Étude pour évaluer la présence de Synopeas myles

En 2018, une importante étude a été amorcée au Québec et en Ontario afin d’en apprendre plus sur la distribution, l’abondance et les taux de parasitisme de Synopeas myles. Entre 2018 et 2022, des plants de canola présentant des signes d’infestation de CCF ont été échantillonnés dans 53 champs à travers sept régions du Québec [Abitibi-Témiscamingue (AT), Bas-Saint-Laurent (BSL), Saguenay–Lac-Saint-Jean (SLSJ), Gaspésie (GAS), Capitale-Nationale (CN), Chaudière-Appalaches (CA), Montérégie-Est (ME)] à la recherche de parasitoïdes. Synopeas myles a été retrouvé dans toutes les régions et dans la majorité des champs échantillonnés (83 %), particulièrement en AT, au BSL et au SLSJ. Il était aussi présent tout au long de la saison, soit du début du mois de juillet jusqu’à la fin de septembre.

Le taux de parasitisme observé durant les cinq années d’étude était de 12,2 %, ce qui est plus élevé que celui rapporté en Europe. Les taux de parasitisme étaient plus élevés en AT (19,2 %) et au SLSJ (12,6 %), mais beaucoup plus faibles en ME (3,5 %), dans CA (1,2 %) et dans la CN (0,8 %). Des valeurs intermédiaires ont été observées au BSL (7,7 %) et en GAS (6 %). Au fil des ans, le taux de parasitisme a diminué, passant de 25,4 % en 2018 à 4,9 % en 2021, soit le taux de parasitisme le plus bas observé au cours du projet. Une remontée a été observée en 2022 (9,6 %). 

Cette étude a permis de montrer que Synopeas myles est bien implanté au Québec, particulièrement dans les régions productrices de canola (AT, BSL, SLSJ). Sa présence dans les champs tout au long de la saison suggère que l’espèce participe à la régulation des populations de CCF. Ces connaissances peuvent maintenant être utilisées pour développer des stratégies de lutte biologique par conservation, telle que l’implantation de bandes riveraines ou fleuries en bordure de champ, afin de favoriser les populations de Synopeas myles en leur offrant un abri et des ressources alimentaires. La mise en place de ces actions contribuerait à améliorer la gestion durable de la CCF dans le canola en Ontario et au Québec.

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Pour en connaître davantage sur les ravageurs et les ennemis naturels dans la culture du canola au Québec, consulter le Guide des ravageurs et des ennemis naturels du canola au Québec publié en 2021 par le CÉROM.