Grandes cultures 28 septembre 2023

Le sarrasin, l’avoine nue et le soya IP identifiés comme prometteurs pour l’autonomie alimentaire

Équiterre, en collaboration avec le Collectif Vital et la Chaire de recherche du Canada sur les inégalités en nutrition et santé, a dévoilé, le 27 septembre, une étude visant à proposer une vision durable de l’autonomie alimentaire, c’est-à-dire axée sur la santé humaine et la protection environnementale. L’étude, réalisée par l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), expose le coût social et environnemental de trois produits ultratransformés, puis explore trois filières agricoles qui apparaissent prometteuses, soit le sarrasin, l’avoine nue et le soya non génétiquement modifié. 

Ces trois filières ont été identifiées dans le rapport comme particulièrement nutritives et pouvant être produites à moindre impact environnemental. Dans le cas du sarrasin, riche en protéines, en vitamines et en fibres, l’IRÉC souligne qu’il peut être utilisé à la fois comme culture de couverture et engrais vert et pousse rapidement, même en secteur nordique, tout en nécessitant peu d’engrais et de pesticides. L’avoine nue, qu’on peut consommer comme du riz et qui est riche en fibres et en protéines, a l’avantage de pouvoir servir tant comme engrais vert qu comme culture pour l’alimentation humaine. Quant au soya, il est, quant à lui, une source de protéines complètes, dont la culture est répandue au Québec. Utilisé en rotation, il permet, selon le rapport, de rétablir la fertilité des sols à la suite de cultures plus gourmandes, comme les céréales.

L’étude révèle que le sarrasin et l’avoine nue ont actuellement une demande limitée auprès de consommateurs québécois. En produire plus risquerait d’entraîner un surplus qui resterait sur les tablettes, un peu le syndrome de la poule et de l’œuf.

C’est pour ça qu’on parle de développer par filière, afin de faire concorder la production, la mise en marché et la stimulation de la consommation. Tout doit s’arrimer. Autrement, ça va rester à l’échelle artisanale.

François L’Italien, professeur associé au Département de sociologie de l’Université Laval et cosignataire de l’étude

La culture du soya, pour sa part, est déjà répandue au Québec, mais pour augmenter la part du soya à l’identité préservée (IP), non génétiquement modifié, qui se situe à 30 %, le chercheur suggère de miser notamment sur les emballages. « On pourrait identifier ces produits pour que les consommateurs puissent mieux les repérer, dit-il. Il y a une demande pour ça et les gens sont prêts à payer plus. »

L’étude vise à proposer une vision durable de l’autonomie alimentaire, c’est-à-dire axée sur la santé humaine et la protection environnementale. Photo : Équiterre

Produits ultratransformés

L’étude rappelle aussi que les produits ultratransformés, comme les croustilles, les pizzas surgelées et les yogourts utilisant du lait diafiltré, sont préparés avec des produits ayant déjà subi une première étape de transformation, puis présentent une haute teneur en gras, en sel et parfois en sucre. « On a regardé ces trois filières, mais on aurait pu en regarder d’autres également », mentionne M. L’Italien.

Selon Équiterre et ses partenaires, il y a un recadrage à faire pour définir les objectifs qui devraient dicter le genre d’autonomie alimentaire dont souhaite se doter le Québec. « Produire des chips et de la pizza surgelés transformés ici avec des ingrédients importés, voire même locaux, constitue pour certains une façon de bâtir l’autonomie alimentaire », explique Carole-Anne Lapierre, agronome et analyste en agriculture et systèmes alimentaires chez Équiterre. « Ce n’est pas tout à fait faux, mais l’étude montre que ce n’est pas durable sur le plan environnemental ni bénéfique pour la santé des gens. »

Dans l’ensemble, le développement de ces différents secteurs agricoles pourrait tirer profit de la politique gouvernementale d’approvisionnement local par les institutions publiques, estime François L’Italien. « C’est un bon levier, car il y a une masse critique d’acheteurs », affirme-t-il.

Mais pour s’assurer du succès, il y a selon lui un impératif de coordination, insiste le chercheur. « Il faut pouvoir asseoir les gens ensemble pour chaque filière, estime-t-il. Cette responsabilité ne doit pas reposer sur les épaules des agriculteurs. Il faut s’assurer que ces productions puissent être rentables, et c’est pour ça qu’il faut agir de concert. Pour que la chaîne de valeur soit bien répartie. »