Grandes cultures 18 janvier 2024

La valeur n’attend pas le nombre des années

Se consacrant exclusivement aux grandes cultures depuis à peine cinq ans sous l’impulsion de Jean-François Bolduc et Karine Vachon, la Ferme JF Bolduc figure déjà comme un leader parmi ses pairs en Estrie. 

Située à Compton, la ferme a conservé pendant plus de 40 ans une double vocation, laitière et de grandes cultures, depuis sa fondation en 1975 par Claude Bolduc et Lucille Quirion. Le transfert de l’entreprise en 2013 à leur fils Jean-François et sa conjointe Karine laissait présager un vent de changement. 

Lucille Quirion et Claude Bolduc ont démarré leur exploitation agricole en 1975 à Compton. 

Moins de deux ans plus tard, les nouveaux propriétaires procédaient à l’acquisition de nouvelles terres et en 2018, la Ferme JF Bolduc liquidait son quota laitier pour se consacrer uniquement aux grandes cultures. « Ça a été un tournant, explique Karine Vachon. Une de nos premières décisions a été de s’équiper d’une balance à grains pour avoir une idée très précise de ce qu’on aurait à commercialiser. »

L’expertise et les méthodes avant-gardistes dans le domaine des grandes cultures étaient cependant déjà présentes. Dès le début des années 2000, Claude Bolduc travaillait une partie de ses champs par semis direct, une technique aujourd’hui pratiquée sur les 500 acres de la propriété, semés à parts égales avec du maïs et du soya. 

Chez nous, il n’y a plus de sol à nu. Ça nous permet de diminuer de beaucoup notre quantité d’herbicide, et on a moins besoin de passer de temps au champ. Et avec une saison pluvieuse comme on a connue en 2023, on a vu que ça nous a donné des sols plus résilients. C’est pareil quand on connaît des périodes de sécheresse 

Jean-François Bolduc

Chaque année, la Ferme JF Bolduc réserve deux champs d’une trentaine d’acres pour tester de nouvelles variétés de maïs et de soya. « Toutes les récoltes sont analysées et pesées dans notre balance. On teste deux ou trois cultivars et si les résultats sont concluants, ce sont les parcelles gagnantes qu’on va planter à grande échelle l’année suivante », explique Karine Vachon. 

Technologie et ingéniosité

Intéressés par les nouvelles technologies liées à l’agriculture, les propriétaires de la Ferme JF Bolduc se sont équipés d’un drone. « Une des terres que nous avons achetées en 2015 n’avait pas de plan de drainage. L’été passé, avec les pluies, on voyait les drains dans le champ. On a utilisé notre drone pour faire un plan complet de drainage et à court terme, on va relever cette portion de terre-là pour en améliorer le rendement. C’est une technologie qui nous permet d’augmenter notre productivité et d’améliorer notre bilan environnemental. Au lieu de traiter un champ au complet, on intervient là où il en a besoin. Dans notre vision, les technologies sont là pour diminuer le plus possible notre impact », poursuit Karine Vachon.

Côté innovation, l’agricultrice sait aussi qu’elle peut compter sur l’ingéniosité de son conjoint. Patenteux de nature, Jean-François Bolduc est toujours à l’affût d’une façon de faire pouvant faciliter le travail et améliorer la productivité. L’une de ses dernières « trouvailles » a été de convertir un vieux planteur de maïs en un équipement servant à tasser les résidus avant les semis printaniers.

« Avec le semis direct, on se ramasse avec un couvert épais de matière organique en décomposition dans les résidus de culture. Je l’ai utilisé le printemps dernier et ça fonctionne très bien. Ce sont des projets de récupération comme celui-là qui nous permettent de garder nos coûts de production le plus bas possible », explique le producteur. 

« On essaie d’être économiquement le plus autosuffisants possible. Au lieu de faire affaire avec des forfaitaires, on a toutes nos machines pour être capables de travailler. Souvent, c’est de la machinerie qu’on a récupérée. On veille à bien évaluer nos coûts de production pour être économiquement efficaces. C’est important de bien comprendre combien ça nous coûte pour faire un bon plan de commercialisation », précise sa conjointe, qui ajoute en riant que les sorties romantiques du couple se déroulent souvent dans les cours de machinerie. 

Pour les aider dans leurs opérations, Jean-François et Karine peuvent compter sur l’aide de leurs deux enfants, Eliane et Maxim, respectivement vétérinaire pour les grands animaux et programmeur informatique ayant développé une spécialité dans les projets agricoles. « On est bien fiers d’eux, d’autant plus qu’ils ont gardé un pied en agriculture dans leur travail. Ils viennent nous aider, tout comme les parents de Jean-François. Nous sommes vraiment bien entourés », soutient l’agricultrice. 

Environnement et partage de connaissances

L’environnement est au cœur des préoccupations des propriétaires de la Ferme JF Bolduc. Depuis trois ans, le couple d’agriculteurs utilise les bandes riveraines et un pâturage réservé à des chevaux pour semer des plantes florales dans le but d’alimenter les insectes pollinisateurs. « Nous essayons de diminuer l’impact que nous avons sur la biodiversité en tant que producteurs de grandes cultures », souligne Karine Vachon, ajoutant que la ferme a aussi soumis sa candidature pour faire partie du programme Agriclimat visant à mesurer son empreinte carbone.

Sur des bandes riveraines, des plantes florales ont été semées pour attirer des insectes pollinisateurs. 

Désireux de partager leur vision moderne de l’agriculture, Jean-François Bolduc et Karine Vachon étaient les hôtes à Compton l’été dernier de la Tournée des grandes cultures. « C’est un projet qu’on essayait d’amener en Estrie depuis longtemps. Cela a été une belle réussite », affirme fièrement Karine, qui occupe la vice-présidence du syndicat des producteurs de grains de sa région tout en étant représentante pour les producteurs de grandes cultures à la fédération régionale. 

La Ferme JF Bolduc est située à Compton, en Estrie. 

La Ferme JF Bolduc collabore également avec des établissements d’enseignement de la région. « Nous avons développé des méthodes qui sont différentes et innovatrices, et nous trouvons important de les partager. Nous avons travaillé entre autres avec des étudiants de l’Université de Sherbrooke sur un projet en agriculture. Un groupe d’étudiants en études professionnelles est aussi venu voir notre machinerie et comment on travaillait. C’est important pour nous de faire une place aux
jeunes », conclut Karine Vachon.