Ma famille agricole 21 septembre 2023

Précurseurs dans la culture des algues

SEPT-ÎLES – Déjà détenteurs d’un restaurant et d’une entreprise en construction, Sandra Blais et André Gauthier n’ont pas eu peur de se lancer dans un projet de ferme maricole, et de s’aventurer les premiers dans la culture des algues. Grâce à leur vaillance et leur persévérance, ils surmontent les défis un à un.

C’est en 2008 que l’occasion s’est présentée pour le couple formé de Sandra Blais et André Gauthier de se lancer dans la mariculture, une activité à la frontière entre l’agriculture et l’aquaculture consistant à cultiver des moules et autres mollusques.

« On allait souvent camper sur la plage de l’île La Grosse Boule, l’une des sept îles de Sept-Îles, avec notre fille Meggie. Quelqu’un avait bâti un projet de ferme maricole là-bas et ça faisait 10 ans que c’était à vendre. Un jour, on s’est demandé : “Pourquoi on ne l’achèterait pas, nous?” Puis on l’a fait! » raconte Sandra Blais.

Tandis que Sandra continuait de gérer le Comptoir 560, plus vieux restaurant de Sept-Îles encore en activité, André travaillait en construction. À part quelques expériences de pêche en amateur avec la famille, rien ne les prédestinait à cette aventure.

Ils se sont retroussé les manches pour remettre à l’eau les filières de cordes auxquelles s’accrochent les moules, le temps qu’elles atteignent une taille commercialisable, ce qui prend trois ans. La Ferme Purmer était née.

Après y avoir d’abord campé, André Gauthier et Sandra Blais ont élu domicile sur l’île La Grosse Boule. Photo : Geneviève Quessy

Alors qu’ils s’apprêtaient à récolter leur première cuvée, une catastrophe pétrolière s’est abattue sur la baie de Sept-Îles, une marée noire visqueuse qui a fait mourir les oiseaux. « Les moules étaient perdues. Plus de 250 000 livres de moules, pas assurables puisque c’était une première récolte », se souvient Mme Blais.

Pendant deux ans, ils n’ont rien pu remettre à l’eau, le temps que le dégât pétrolier s’estompe. Ce temps de réflexion leur a donné de nouvelles idées. Après avoir visé au départ l’exportation, Sandra Blais et André Gauthier ont décidé de viser plus petit pour leur culture de moules, tout en se diversifiant.

« On a décidé de faire de l’affinage de pétoncles et de l’affinage d’huîtres, et comme on entendait parler d’un marché pour les algues comestibles, ça nous a donné envie d’essayer d’en cultiver », raconte la productrice.

Un projet de quatre ans, parrainé par le centre de recherche Merinov, leur a permis d’apprendre les bases de la culture des algues, une activité encore inédite au Québec, mais pratiquée ailleurs au Canada. C’est ainsi qu’ils ont adopté la technique de culture qui consiste à ensemencer une corde de plantules d’algues, puis à l’entortiller autour d’une autre corde installée à l’horizontale. Une fois descendues dans l’eau, les algues poussent, et peuvent s’allonger jusqu’à une longueur de 10 ou 12 mètres. Pour les récolter, il suffit de remonter la corde.

Les algues sont ensuite nettoyées et brossées, puis blanchies à l’eau bouillante. Ce processus fait que leur couleur brune se transforme en un beau vert éclatant. Elles peuvent ensuite être séchées ou emballées sous vide.

Les touristes arrivent par bateau pour découvrir la mariculture et faire une dégustation d’algues. Photo : Geneviève Quessy

Des plantules difficiles à trouver

Grâce au soutien de Merinov, qui leur fournissait les plantules, le projet de culture d’algues semblait sur les rails. Toutefois, quand cet approvisionnement a cessé avec la fin du projet, trouver des plantules est devenu très compliqué.

« On a fait affaire avec une ferme de la Gaspésie, puis ça ne marchait plus. Aujourd’hui, c’est notre principal défi. On n’est pas capables de s’approvisionner en plantules », dit Sandra Blais. En attendant de trouver une solution, leur seule récolte d’algues provient des quelques plantules qui se fixent naturellement sur leurs cordes, l’algue étant naturellement présente dans l’environnement marin. 

Sur la plage de l’île La Grosse Boule, hérissée de rochers et d’épinettes, de grandes yourtes ont été érigées où des campeurs se la coulent douce, pendant que des touristes arrivent par bateau pour venir écouter une présentation informative sur la culture des moules et des algues, puis l’affinage des huîtres et des pétoncles.

« Sans l’agrotourisme, on n’y arriverait pas. C’est ce qui fait que l’on continue. On s’est lancés dans quelque chose qui n’existait pas encore, qui ne rentre pas dans les cases, à mi-chemin entre l’agriculture et l’aquaculture. Ce sera plus facile pour les prochains producteurs et ça nous fera plaisir de leur transmettre nos connaissances. Le but, maintenant, c’est que notre fille Meggie prenne la relève », dit Mme Blais.  

« Merroir » local

« Rien n’est vraiment techno ici », dit André Gauthier en riant. « On travaille avec des cages en métal et des cordes et on n’a pas besoin de plus! » Tandis que les algues et les moules poussent accrochées sur des cordes suspendues dans l’eau, l’affinage des pétoncles et des huîtres se passe différemment. Les délicats pétoncles sont disposés dans des filets à lanterne de dix étages, et les huîtres dans des cages en métal qu’on appelle « berceaux ». Achetés des provinces maritimes, les mollusques passent huit semaines dans l’eau. Sa température et sa salinité particulière suffisent à leur donner le goût du « merroir » local. C’est ce qu’on appelle l’affinage. 

Les cages, appelées « berceaux », contiennent les huîtres durant huit mois, une période qui permet à ces dernières de prendre un goût et une salinité reflétant le « merroir » local. Photo : Gracieuseté de la Ferme maricole Purmer

Le bon coup de l’entreprise

Même si la culture des algues demeure difficile, Sandra Blais et André Gauthier pensent tout de même que de se lancer dans cette aventure a été leur meilleure décision. « Quelqu’un qui voudrait en vivre en ce moment, ce n’est pas un gagne-pain. Pour l’instant, ceux qui arrivent à tirer leur épingle du jeu sont ceux qui font la cueillette sauvage. Mais ça deviendra plus facile pour les prochains », dit André Gauthier. Le couple de défricheurs propose même de partager ses connaissances pour aider à mettre en place une filière. Pendant qu’André travaille en mer, Sandra développe des recettes et des façons de conditionner les algues. Leur fille Meggie et leurs petites-filles accueillent les touristes qui viennent apprendre sur la mariculture et déguster des produits à base d’algues. « De s’être positionnés pour cultiver des algues, ça nous démarque. Quand on va avoir réglé le problème d’approvisionnement de plantules, on sera prêts. »   

Les propriétaires de la Ferme maricole Purmer manipulent les cordes qui, une fois dans l’eau, serviront à accrocher les moules et les algues. Photo : Geneviève Quessy
Fiche technique
Nom de la ferme :

Ferme maricole Purmer

Spécialités :

Culture de moules et d’algues, affinage d’huîtres et de pétoncles

Année de fondation :

2008

Noms des propriétaires :

Sandra Blais et André Gauthier

Nombre de générations :

2


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