Des vaches laitières aux wapitis

SAINTE-PERPÉTUE – Les wapitis de la Ferme le Roy du cerf font depuis longtemps partie du panorama de la campagne de Sainte-Perpétue, dans le Centre-du-Québec. Nancy Therrien et Raynald Roy vont célébrer l’an prochain les trente ans de leur odyssée dans le monde de l’élevage des cervidés, une aventure parsemée de défis qu’ils ont su relever avec philosophie.

Avec du recul, le producteur Raynald Roy reconnaît que de se lancer dans l’élevage du cerf rouge et du wapiti, en 1995, relevait de l’aventure.

« Dans les années 90, la demande du marché asiatique pour les bois de cervidés a explosé. Il se vendait jusqu’à 60 $ la livre », raconte-t-il. 

Mais la situation a vite basculé. Les prix ont chuté après quelques années à peine sous l’effet de multiples facteurs, dont la crise de la vache folle. Étant déjà engagés sur ce nouveau chemin, M. Roy et sa conjointe, Nancy Therrien, ont quand même décidé de poursuivre l’aventure. « Au début, on ne savait pas trop dans quoi on s’embarquait », avoue le producteur. « On a pris les problèmes les uns après et les autres. C’est comme ça qu’on a avancé. »

Force est de constater que cette philosophie a bien servi le couple puisque, 30 ans plus tard, l’exploitation compte jusqu’à 230 têtes, fait la transformation et la commercialisation de ses produits, principalement à partir de leur petite épicerie-boucherie de Drummondville.

Quand on a commencé l’élevage des cerfs rouges et des wapitits, en 1995, il a fallu apprendre vite pour être efficace. 

Raynald Roy

Changement de cap

L’élevage de cervidés sur la terre familiale des Roy est le résultat d’un changement radical d’orientation dans la vocation de l’exploitation. Raynald Roy a acquis la ferme familiale de son frère en 1988 et y a poursuivi la production laitière pendant sept années jusqu’à ce qu’il se retrouve à la croisée des chemins. 

« Il fallait faire des investissements majeurs pour moderniser nos installations », explique l’agriculteur. « On s’est plutôt laissés tenter par l’aventure de l’élevage de wapitis, qui demandait beaucoup moins d’investissements. »

À ses débuts, le troupeau comptait des cerfs rouges femelles et des wapitis mâles. Rapidement, l’éleveur a mis à contribution son expertise dans le travail de la génétique avec les vaches laitières pour rehausser la qualité de son troupeau de façon à obtenir des bêtes plus massives.

« Je peux maintenant affirmer que mes animaux possèdent plus de 98 % de gênes de wapitis », soutient Raynald Roy. 

Son travail a fait en sorte que les animaux ont considérablement gagné en masse. « Au début, les femelles pesaient environ 250 livres, alors qu’elles font maintenant plus que le double », explique l’éleveur. 

Autre avantage appréciable : ce travail sur la génétique a permis de produire des animaux moins agressifs, donc plus faciles à gérer. De plus, l’engraissement des animaux en étable de finition permet d’obtenir une viande plus tendre.

Le troupeau compte jusqu’à 230 têtes en période de vêlage. Environ 60 naissances sont enregistrées chaque année. Un nombre équivalent de bêtes sont dirigées à l’abattoir. 

La vente des bois de wapitis, même si elle ne génère plus les profits des débuts, n’a pas pour autant été abandonnée. Une fois sectionnés, les bois sont vendus à un grossiste pour être transformés dans l’Ouest canadien.

Les bois des cervidés, même s’ils ne constituent plus la manne des débuts, sont toujours vendus à des transformateurs.

La famille continue à cultiver les 80 hectares de terre essentiellement pour l’alimentation du troupeau. Environ 50 hectares sont cultivés en foin, 12 en céréale et les huit restants sont utilisés comme pâturage.

Et il y a toujours cette question qui reste d’actualité à la ferme, celle de la relève. Si les trois enfants ont participé aux activités de l’entreprise au fil des années, aucun n’a pour l’instant exprimé le souhait d’en reprendre les rênes. 

Les deux aînés, Anthony et Rachèle, se consacrent à leur emploi à l’extérieur de l’exploitation agricole. Seule la cadette, Karolane, s’implique encore dans la régie du troupeau.

Raynald Roy continue d’espérer qu’une nouvelle génération prendra un jour en main l’avenir de la ferme familiale.  

Aujourd’hui encore, la jeune Karolane, la cadette de la fratrie, s’implique beaucoup dans la régie du troupeau aux côtés de son père.

Le bon coup de l’entreprise 

C’est en 2017 que le couple Therrien-Roy a entrepris la construction d’une nouvelle étable où loger, pendant l’hiver, un petit groupe de bêtes destinées à l’abattoir. Raynald s’est lui-même chargé des travaux. 

« Notre étable de finition, c’est le meilleur moyen de faire une viande de qualité », assure le producteur. « Si on avait eu des installations semblables à nos débuts, les opérations auraient été plus faciles et on aurait gagné en productivité. »

Une vingtaine de bêtes sont placées dans des stalles individuelles pour être nourries au grain pendant deux à trois mois.

« Les gros mâles peuvent prendre jusqu’à deux kilos par jour, ce qui n’est pas possible lorsqu’ils sont à l’extérieur parce qu’ils dépensent trop d’énergie. »

Sans compter que le fumier sur paille ainsi récupéré sert à la fertilisation des champs. 

Dans l’étable de finition, une vingtaine d’animaux peuvent séjourner pendant les mois d’hiver dans des stalles sur lit de paille avant de retourner à l’extérieur quelques semaines au printemps.

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Faire en sorte de gagner en efficacité et en qualité

Au fil des années, le travail de la génétique et l’étape d’engraissement en étable ont permis au producteur d’être plus efficace et de produire une viande moins grasse appréciée des consommateurs.

Commercialiser sa production

Le Roy du cerf, c’est aussi une entreprise de transformation et de commercialisation de plus de 150 produits, aliments sans gluten et repas préparés. Les activités, supervisées par Nancy Therrien, sont centralisées dans un local de Drummondville, attenant à leur petite épicerie, qui emploie cinq personnes.

Développer ses points de vente

Les éleveurs de Sainte-Perpétue ont rapidement constaté qu’ils devaient offrir directement leurs produits au consommateur. « On ne pouvait pas se fier uniquement à la vente dans les grandes surfaces, où nos produits n’étaient pas suffisamment mis en valeur », explique Raynald Roy. C’est donc principalement à sa petite
boucherie-épicerie de Drummondville que les produits sont en vente aux côtés de ceux d’autres entreprises de transformation de la région. Ils demeurent tout de même disponibles dans certaines grandes surfaces, notamment à Québec, en Mauricie et en Estrie, et sont aussi servis dans quelques restaurants de la région. 

Le troupeau compte jusqu’à 230 wapitis, soit autant de mâles que de femelles. Plus d’une cinquantaine de naissances sont enregistrées chaque année.
Fiche technique
Nom de la ferme :

Ferme le Roy du cerf

Spécialité :

Wapitis

Année de fondation :

1995

Superficie en culture :

80 hectares

Noms des propriétaires :

Raynald Roy et Nancy Therrien

Nombre de générations :

3

Cheptel :

Jusqu’à 230 wapitis

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