Politique 3 mai 2023

Le fédéral surveillera moins l’édition génomique que les OGM

La ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada, Marie-Claude Bibeau, a annoncé, le 3 mai, la mise à jour des directives sur la réglementation des semences qui, concrètement, vient abaisser la surveillance du fédéral concernant les variétés de plantes issues de l’édition génomique comparativement aux variétés issues de la modification génétique (OGM).

Certaines semences issues de cette technologie, qui est différente de la modification génétique (voir l’encadré plus bas), ne seront plus obligatoirement évaluées par le gouvernement fédéral. Ottawa invite plutôt les compagnies à inscrire, volontairement, les nouvelles variétés issues de l’édition génétique dans une base de données qui fera l’objet d’une surveillance pour assurer, dit-on, « son exhaustivité et sa robustesse ». De plus, un comité formé de représentants du gouvernement et de l’industrie sera créé afin de faciliter les discussions sur la transparence des innovations en sélection végétale.

Réactions

Cette annonce enchante les Producteurs de grains du Québec (PGQ), déplaît au Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec et rebute l’organisme Vigilance OGM. « Comment Mme Bibeau peut parler de transparence, alors qu’elle refuse de conserver un registre obligatoire public sur les variétés [issues de l’édition génomique], tel que le demandaient même des agriculteurs, dont ceux de la Coopérative pour l’Agriculture de Proximité Écologique (CAPÉ)? dénonce Thibault Rehn, coordonnateur de Vigilance OGM. Clairement, elle a choisi son camp et c’est celui des lobbyistes de l’industrie, car on s’aperçoit qu’elle utilise le même discours que celui de l’industrie. »

Au Syndicat des producteurs de grains biologiques du Québec, le président Pierre Labonté dit qu’il aurait aimé que des marqueurs génétiques soient plutôt mis en place permettant d’identifier une variété issue de l’édition génomique. « Comment on va faire pour savoir si nos semences conventionnelles ont été contaminées avec des semences de l’édition génomique? Il n’y aura plus de garantie pour le secteur bio », se désole-t-il.

Chez les Producteurs de grains du Québec, le président Christian Overbeek s’est dit satisfait de la décision du fédéral. « La démarche retenue est basée sur la science et non sur les perceptions et il y aura une évaluation annuelle de la démarche qui permettra possiblement de la corriger. » Selon lui, il était important que le fédéral n’empêche pas les producteurs de grains de bénéficier de ces variétés plus performantes qui offrent de meilleurs rendements ou des caractéristiques supérieures recherchées par des acheteurs, comme des grains plus riches en fibres et en acides aminés.

La base de données des variétés issues de l’édition génétique de même que les audits sur les méthodes de développement de ces variétés devraient apporter un élément de sécurité, estime-t-il. En ce qui concerne le consommateur, M. Overbeek croit que l’édition génétique, si elle est bien vulgarisée, suscitera moins de craintes auprès de la société que la modification génétique.

Qu’est-ce que l’édition génomique?

Plutôt que d’intégrer de l’ADN étranger, l’édition génomique consiste à couper la séquence d’ADN de la plante afin d’amplifier, de supprimer ou de diminuer un caractère pour améliorer les performances des plantes.