Environnement 11 août 2023

Le manque d’eau davantage étudié

En matière de gestion de l’eau en milieu agricole, les recherches ont surtout été orientées jusqu’à maintenant sur les sécheresses et le manque d’eau. « Mais là, avec l’été qu’on connaît, on s’aperçoit qu’on devra aller aussi dans l’autre sens, du côté de la gestion des surplus d’eau », indique Carl Boivin, chercheur à l’Institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA).

Dans de telles situations, il n’y a pas de magie, estime le chercheur. « Il faut travailler en amont plutôt qu’à court terme. Mais, que ce soit par rapport au manque d’eau ou au surplus, il y a encore du travail à faire, estime-t-il. On voit par exemple dans la culture de la pomme de terre qu’il existe différentes variétés, mais que le choix est souvent orienté en fonction du rendement, du marché, de la résistance à telle ou telle maladie, du besoin en fertilisant, mais qu’on s’intéresse moins au besoin en eau. On n’a pas beaucoup d’information là-dessus. On en parle un peu plus maintenant, mais ça reste que les conseillers en connaissent encore peu sur le sujet », constate-t-il. Par contre, dans la laitue, par exemple, des variétés sont développées pour mieux faire face aux grandes chaleurs, ou aux pucerons, grâce à la génétique trouvée dans des laitues sauvages.

L’enchaînement d’événements extrêmes, comme les sécheresses connues ces dernières années, a motivé le financement de plusieurs recherches pour aider les producteurs agricoles à développer, entre autres exemples, des systèmes de captation des eaux de pluie ou d’optimisation des systèmes d’irrigation, rapporte M. Boivin. « On vit un peu la même chose cet été, mais sur l’enjeu du surplus d’eau. C’est toujours un peu comme ça que ça se passe. On peut avertir les gens sur ce qui s’en vient pour qu’ils s’y préparent, mais on dirait que là, il pleut, et on voit le problème. C’est souvent ce qui éveille l’intérêt et qui peut amener le financement de recherches sur cet enjeu. »


Plus d’extrêmes à prévoir

Angelica Alberti-Dufort

Dans les prochaines années, la météo risque de donner de plus en plus du fil à retordre aux producteurs agricoles. « Il va faire plus chaud, certainement, et il va y avoir plus d’événements extrêmes : des périodes de chaleur prolongée et des sécheresses qui contrasteront avec des précipitations abondantes et plus fréquentes. Il risque également d’y avoir plus de gels hâtifs ou tardifs », énumère Angelica Alberti-Dufort, spécialiste en recherche et en transfert de connaissances chez Ouranos, un pôle de concertation en climatologie.

Les producteurs agricoles du Québec ne seront probablement pas tous affectés de la même manière par ces changements, estime-t-elle, mais plusieurs subiront malheureusement des pertes et de la souffrance, surtout s’ils y sont mal préparés.

Ce qui est certain, c’est que des événements météorologiques comme ceux vécus par plein de producteurs maraîchers cet été sont une bonne occasion de se demander si on est prêts à faire face à une telle situation si elle nous arrivait, suggère-t-elle. Est-ce que j’ai une assurance? C’est quoi mon plan B? Ensuite, il faut regarder les solutions pour se préparer en fonction des besoins.

Angelica Alberti-Dufort

La spécialiste considère qu’il y a de l’espoir, puisque le pays possède déjà une grande expertise et que des solutions existent. « Il faut toutefois s’assurer que ce qui se fait du côté de la recherche percole jusqu’aux producteurs agricoles », prévient-elle. Ouranos collabore d’ailleurs étroitement avec le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec pour favoriser ce transfert de connaissances, notamment par l’intermédiaire d’outils comme le site Agriclimat, qui rassemble un grand nombre de solutions d’adaptation aux changements climatiques pour tous les types de productions agricoles.