Élevage 23 octobre 2023

Peu d’espoir de relance de la filière autruche au Québec

Les autruches ont proliféré au Québec à partir des années 1995 à 2000, alors que plus d’une centaine d’éleveurs ont tenté leur chance dans un marché qui s’annonçait prometteur pour la commercialisation de cette viande. De cette époque, il ne reste aujourd’hui qu’un seul producteur commercial de viande d’autruche, qui ne croit pas en une relance possible du secteur à court terme.

Nicolas Charbonneau est installé à Saint-Eustache, dans les Laurentides, depuis 1995, donc 26 ans. Il y élève une centaine d’autruches annuellement. S’il est le seul éleveur commercial rescapé de la période où cet oiseau a connu son heure de gloire,  c’est sans doute en raison de son modèle d’affaires qui fait une grande place à l’agrotourisme, estime-t-il. Ce volet lui permet d’attirer la clientèle, de faire découvrir la viande d’autruche et de vendre une partie de sa production à la ferme, entre autres.

C’est également cette mise en marché autonome qui lui a permis de survivre quand les principaux acheteurs de cette viande, au début des années 2000, ont délaissé le marché et que plusieurs éleveurs « sont restés pris avec leurs bêtes, perdant beaucoup d’argent », se remémore-t-il.

Nicolas Charbonneau élève des autruches depuis 26 ans à Saint-Eustache, dans les Laurentides.

Une relance peu probable

Dans un article publié sur le site de Radio-Canada, le 31 juillet, un éleveur d’autruches de l’Alberta soutenait que s’il pouvait élever un millier d’autruches, il pourrait tout vendre aux États-Unis, où la demande est très forte pour ce produit. Il encourageait donc la mobilisation du milieu agricole canadien pour saisir cette chance et développer cette production.

Un tel appel ne semble toutefois pas séduire Nicolas Charbonneau, qui reste sceptique quant à une possible relance de la production au Québec.

Côté abattoir, c’est très, très compliqué. Pour aller aux États-Unis, il faudrait d’abord en trouver un de certification fédérale qui est prêt à transformer l’autruche. Puis, il faut aussi coordonner tout le monde pour la mise en marché. Si on arrive à avoir une bonne logistique, ça peut être intéressant, mais il faut encore que les acheteurs [de viande d’autruche] soient prêts à nous payer convenablement, assez pour compenser nos coûts de production.

Nicolas Charbonneau

Pour l’instant, ces coûts sont assez élevés en raison de l’inflation, mais également « parce qu’il est difficile de faire des économies d’échelle en étant le seul éleveur d’autruches de la province », spécifie M. Charbonneau, qui doit notamment préparer lui-même la moulée de luzerne et de maïs qu’il sert à ses animaux.

Dans le passé, il a déjà fait affaire avec quatre grossistes de viande d’autruche, et collabore encore avec l’un d’entre eux, qui exporte d’ailleurs la viande aux États-Unis. Mais il déplore qu’il y ait souvent de longs délais entre la date prévue de livraison des oiseaux et le moment où le grossiste vient les chercher. « Moi, je les nourris tout le temps pour rien. C’est comme ça depuis 26 ans », décrit l’éleveur pour illustrer combien la mise en marché de cette viande, à l’exception de celle qu’il fait lui-même, a toujours été très instable.

Évolution du nombre d’élevages d’autruches au Québec
1991

Aucun

1996

100 fermes (1 470 têtes au total)

2006

10 fermes (429 têtes au total)

2022

4 fermes (162 têtes au total)