Élevage 29 novembre 2017

L’abattage clandestin est florissant

La disparition des petits abattoirs ouvre la porte aux activités d’abattage clandestin, dénoncent des intervenants de la transformation.

« On est passés de 139 abattoirs à une dizaine [NDLR : 29 abattoirs de proximité]. Ça ne prend pas un doctorat en agriculture pour savoir que l’abattage continue à se faire quelque part. On tire ça au bout de la pelle du tracteur, comme dans les années 1940. On est rendus là parce qu’il n’y a plus d’abattoirs », affirme le président de l’Association pour la conservation des petits abattoirs, Kevin Danaher.

Le ministre de l’Agriculture du Québec, Laurent Lessard, se dit préoccupé par la situation et précise que « ce n’est pas pour rien » qu’il effectue présentement une tournée des abattoirs. Interrogé sur le succès de la brigade spéciale d’inspecteurs que son prédécesseur devait mettre en place, il admet que l’augmentation des cheptels pose problème quand la capacité d’abattage diminue. « Les animaux sont passés où? Il y a quelqu’un qui les abat et ils sont dans le congélateur de quelqu’un », lance-t-il.

Un couteau et une 22

Boucher depuis 50 ans à Weedon, Patrice Desmarais, a pour ainsi dire passé sa vie dans la viande. L’introduction de nouvelles normes de salubrité, constate-t-il, a décimé les abattoirs au Québec. Il indique avoir investi pas moins de 250 000 $ au cours des dernières années afin de les respecter. Pendant ce temps, il a vu l’abattage clandestin à la ferme se développer allègrement. « Ces gars-là ne fournissent pas, déplore-t-il. Celui qui abattait deux ou trois vaches par semaine, là c’est cinq ou six. Il n’a besoin que de son couteau, de son aiguisoir et de sa petite carabine 22. C’est ça aujourd’hui. » 

D’après les informations recueillies par La Terre, ces « maraudeurs de fins de semaine » seraient même équipés de camions réfrigérés et fourniraient un service « clé en main », repartant avec les déchets d’abattage afin de laisser le moins de traces possible.

Au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), le porte-parole indique que la loi autorise un agriculteur à abattre ses propres animaux, à la ferme, pour sa consommation personnelle, à condition de respecter la réglementation en ce qui a trait aux carcasses et aux viscères. Le ministère interdit cependant à un tiers de procéder à l’abattage à la ferme, un phénomène qui semble avoir pris de l’ampleur avec la fermeture de plusieurs abattoirs B. Les contrevenants sont passibles d’amendes variant entre 2 000 et 100 000 $.

Avec la collaboration de Pierre-Yvon Bégin

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