Bio 3 mai 2024

La CAPÉ pourrait disparaître

Le milieu des fermes de proximité, principalement représenté par des petits producteurs maraîchers, est en plein bouleversement. Un nombre croissant de fermes changent leur modèle d’affaires, et, signe des temps, même l’organisation qui les représente depuis plus de 10 ans, la CAPÉ, envisage un changement de structure qui pourrait la faire disparaître dans sa forme actuelle. 

Léon Bibeau-Mercier

« On travaille à l’unification de nos multiples marques et noms : la CAPÉ (Coopérative pour l’agriculture de proximité et écologique) et le Réseau des fermiers·ères de famille (RFF). Parfois, on intervient sous le nom CAPÉ et ensuite, on fait du marketing sous le RFF… On veut donc unifier tous nos noms et migrer vers Fermiers·ères de famille (FFF). La CAPÉ serait alors appelée à disparaître et le RFF aussi », explique Léon Bibeau-Mercier, président sortant de la CAPÉ. Il ajoute que le membrariat stagne et est composé essentiellement de maraîchers. « Notre objectif [avec FFF] serait d’aller chercher plus de monde et d’autres productions. » 

Le nouveau président, Maxime Dion, en poste depuis un peu après l’assemblée générale annuelle du 20 mars, milite aussi pour un changement organisationnel.

La CAPÉ ne veut pas dire grand-chose pour le grand public. Ce sera plus facile avec Fermiers·ères de famille. C’est un peu le mandat que je me suis donné, de mettre de l’avant un humain. Fermiers·ères de famille, c’est un humain qui travaille pour nourrir d’autres humains. Et ça fait référence au médecin de famille. Avec un fermier de famille, la bonne santé commence par une bonne alimentation.

Maxime Dion, copropriétaire de la Ferme la Bourrasque, à Saint-Nazaire-d’Acton, en Montérégie

Débat en vue

Le hic, c’est que parmi les membres de la CAPÉ, certains ne sont pas certifiés biologiques et n’adhèrent pas forcément à un concept de mise en marché soutenue par la communauté, comme les abonnements aux paniers de légumes, qui rémunèrent le fermier avant que sa saison de culture s’amorce. 

Ces critères sont pourtant obligatoires pour faire partie des quelque 150 fermes du Réseau des fermiers·ères de famille. Est-ce que le nouvel organisme Fermiers·ères de famille acceptera les membres de la CAPÉ qui ne répondent pas aux critères plus pointus du RFF? 

« Je ne suis vraiment pas d’accord », dit sans ambages Anne Roussel, copropriétaire de la Ferme Cadet Roussel, laquelle a participé à la fondation du Réseau des fermiers·ères de famille, développé par Équiterre en 1996. 

Anne Roussel n’a rien contre les autres fermiers, mais ceux qui ne sont pas bio ou qui vendent uniquement dans un kiosque ou dans une épicerie ne devraient pas faire partie des FFF. « Fermiers·ères de famille, c’est comme un terme protégé. Si ce n’est plus bio et si ce n’est plus un concept d’agriculture soutenue par la communauté, ça perd de son essence et ça veut dire que n’importe qui peut s’appeler fermier de famille. Je suis en désaccord », réitère-t-elle.

Maxime Dion est bien au fait de ce débat. « J’aimerais que Fermiers·ères de famille soit un organisme inclusif. Ce n’est pas parce que tu ne fais pas de paniers que tu n’es pas un fermier de famille. Mais d’un autre côté, ça fait 30 ans que les fermiers de famille sont bio et qu’ils font des paniers. Alors je suis moi-même mitigé. Ce sont les membres qui décideront », dit-il, en faisant allusion à l’assemblée générale extraordinaire du 4 mai, à Victoriaville, qui vise à clore ce débat.