Agrotourisme 28 juillet 2023

Les tables fermières et champêtres se multiplient au Québec

Dans les dernières années, plusieurs nouvelles tables fermières et champêtres ont vu le jour au Québec. La création de ces lieux de partage culinaire idylliques enchante à la fois les producteurs et les gens issus de la restauration, qui mettent les produits de leur ferme en vedette dans leurs assiettes. 

« Ce que j’aime le plus de mon commerce, c’est de partager avec les gens », confie la fondatrice de Fam Cuisine Créative, Rosalie Drum, lorsque questionnée sur les aspects valorisants de diriger une table fermière. Celle qui loue une parcelle de la Ferme Entre Ciel et Terre, située à Sainte-Anne-des-Plaines dans les Laurentides, a troqué la cuisine contre le champ durant la pandémie. Depuis l’année dernière, la cuisinière de formation propose donc des plats concoctés à partir des aliments de son jardin et de produits de la région, servis à l’extérieur et méticuleusement présentés aux clients. « C’est valorisant de mettre des produits locaux dans l’assiette. Ça lui rajoute une histoire à laquelle je crois que les gens s’attachent », constate-t-elle. 

Les tables fermières et champêtre immergent les visiteurs dans l’univers des producteurs. « Je laisse les gens se promener et prendre des fines herbes. Ça fait partie de la beauté de la chose et du partage agricole », affirme Rosalie Drum. Gracieuseté de Rosalie Drum

La directrice générale de l’Association de l’agrotourisme et du tourisme gourmand du Québec, Odette Chaput, constate que le concept a le vent dans les voiles depuis la fin de la pandémie. « On sent un retour de l’engouement qui vient d’un certain nombre de chefs qui quittent la vie régulière de la restauration en ville parce qu’ils ont ce désir de se rapprocher de la terre et de produire eux-mêmes. Ce sont souvent déjà des fervents des produits locaux et régionaux », remarque-t-elle. 

Rosalie Drum soutient que les expériences de repas à la ferme sont aussi nombreuses que le nombre de tables. « Ce que j’ai constaté en faisant une étude de marché avant de démarrer mon projet, c’est que toutes les tables fermières sont différentes. Certaines sont intérieures, d’autres extérieures, certaines ont des animaux, etc. Nous offrons donc des expériences différentes, ce qui est à notre avantage », détaille-t-elle. 

Edith Foliot et Didier Lortie ont pour leur part quitté le domaine des communications afin de lancer la ferme Maison de Soma, située à Mont-Tremblant. Après deux ans de travail sur leur terre, le couple a pu démarrer leurs activités agrotouristiques au début du mois de juillet en lançant d’abord une buvette, qui sera suivie d’une table fermière à l’automne. « Nous voulons montrer à quoi une agriculture démondialisée et de saison peut ressembler au Québec », soutient Didier Lortie. Les deux nouveaux agriculteurs travaillent de concert avec l’équipe de cuisiniers afin de développer un menu de saison mettant à l’honneur leur grande diversité de produits, un objectif partagé par tous les propriétaires de tables champêtres et fermières interrogés.

Un concept à l’épreuve du temps

Au sein de cette multitude de nouveaux projets persistent des fermes qui n’en sont pas à leurs premières tablées. Certaines, comme La Rabouillère, à Saint-Valérien-de-Milton en Montérégie, offrent même l’expérience de la table champêtre depuis plus de 30 ans et peuvent compter sur une relève afin d’assurer leur pérennité. Jérémie Pilon a grandi dans la ferme démarrée par son père, Pierre Pilon, mais a d’abord suivi une formation culinaire avant de se consacrer à La Rabouillère. « J’ai vu l’opportunité que j’avais de m’impliquer dans l’entreprise, d’avoir des responsabilités rapidement, et de retourner aux sources. C’est par mes expériences dans le domaine [de la restauration] que je me suis rendu compte du joyau que j’avais entre les mains », se souvient-il. 

Angèle-Ann Guimond, de la ferme Éden Rouge à Saint-Bruno-de-Guigues, a également étudié la cuisine avant de rejoindre l’entreprise de sa mère, Anny Roy. Bien que leur ferme offre une expérience de table champêtre depuis 2014, Angèle-Ann Guimond sent que le public répond encore à l’appel. « Il y a encore des gens, même du Témiscamingue, qui vivent leur première expérience de terre à la table chez nous. Le public est encore dans la découverte », constate-t-elle.

Table Champêtre, une appellation contrôlée

L’appellation Table Champêtre est une marque déposée de l’Association de l’agrotourisme et du tourisme gourmand du Québec (AATGQ). Les producteurs doivent respecter certaines exigences afin de l’utiliser. Les plats présentés à la table champêtre doivent notamment être composés d’au moins 51 % de produits de la ferme-hôte. À l’heure actuelle, quinze tables champêtres sont reconnues et dispersées à travers le Québec. À ces dernières s’ajoutent les tables fermières qui, bien qu’elles ne se soient pas dotées de l’appellation, proposent également une expérience culinaire en milieu agricole. 

Odette Chaput explique que le désir de créer une marque déposée pour les tables champêtres a émergé au début des années 1980, à la suite du début des activités d’agrotourisme à la fin des années 1970. La directrice de l’AATGQ mentionne que c’est le désir des agriculteurs de faire connaître leur réalité agricole qui a fait naître des activités comme l’hébergement à la ferme. « Le mouvement des tables champêtres s’est inscrit en continuité de vouloir recevoir sans nécessairement héberger », ajoute-t-elle.