Actualités 15 décembre 2019

Coup d’oeil sur les myopathies équines

En tant qu’athlète et animal de travail, le cheval est particulièrement susceptible de subir des troubles du système locomoteur.

Parmi ceux-ci, les désordres musculaires, appelés myopathies, peuvent survenir pour différentes raisons. Par exemple, les cellules musculaires peuvent être endommagées par des traumatismes, un exercice mal adapté au degré d’entraînement, des agents infectieux et des intoxications. Certaines blessures sont liées à la discipline; par exemple, les sauteurs sont davantage sujets à étirer leurs muscles lombaires, tandis que les chevaux de reining heurtent plus souvent les masses musculaires des membres postérieurs. Malgré un entraînement prudent, plusieurs races demeurent prédisposées au développement de troubles musculaires étant donné l’héritabilité de certaines maladies. Notamment, la myopathie à stockage de polysaccharides (« PSSM ») affecte particulièrement les chevaux de trait, les Quarter Horses et les Warmbloods. Cette pathologie génétique peut engendrer un large spectre de signes cliniques, allant d’un léger inconfort chronique à de possibles épisodes subits de dommages musculaires sévères. Au Québec, une autre cause notable de myopathie est d’origine nutritionnelle.

Sophie Mainguy-Seers est candidate au Ph. D. à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université  de Montréal et participe au Laboratoire de recherche sur l’asthme équin.
Sophie Mainguy-Seers est candidate au Ph. D. à la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal et participe au Laboratoire de recherche sur l’asthme équin.

Effectivement, plusieurs régions possèdent des sols pauvres en sélénium, un nutriment important pour la protection de l’intégrité des cellules contre les radicaux libres. Votre vétérinaire pourra vérifier si le contenu en sélénium dans la diète de votre cheval est adéquat. À noter qu’un apport excessif en sélénium est aussi néfaste qu’une supplémentation insuffisante.

Les signes cliniques

Les signes cliniques des myopathies varient en fonction de leur localisation et de leur cause primaire. Elles peuvent
atteindre un groupe précis de muscles ou bien être généralisées. Parfois, les signes peuvent être nébuleux et seulement s’exprimer par une diminution de performance, un manque d’entrain au travail ou bien une boiterie. Il se peut qu’un cheval qualifié de « paresseux » souffre en fait d’une pathologie musculaire insidieuse. Dans d’autres cas, les dommages musculaires sont si importants que le cheval peut être incapable de se déplacer. Des masses musculaires dures, chaudes et douloureuses au toucher peuvent mettre la puce à l’oreille. Divers outils permettront à votre vétérinaire de clarifier si une anomalie musculaire est à l’origine des changements observés chez votre cheval. Par des prises de sang, il est possible de déterminer la présence de dommages musculaires, ainsi que leur sévérité et leur chronicité. Parfois, des biopsies musculaires sont nécessaires pour déterminer la cause des anomalies, et plusieurs tests génétiques sont disponibles et peuvent être indiqués selon la race et les signes observés.

La rhabdomyolyse, un épisode de dommage musculaire important, constitue une condition urgente, puisqu’elle peut s’accompagner de complications majeures, notamment au niveau rénal. La myoglobine, un pigment servant de réservoir d’oxygène pour les cellules musculaires, est libérée lors de la destruction de ces cellules, se retrouvant ainsi dans la circulation sanguine. Lorsque ces pigments sont filtrés par les reins, ils se concentrent dans l’urine et peuvent conférer une couleur brunâtre à celle-ci. En grande quantité, ces pigments peuvent obstruer les tubules rénaux et incidemment produire des dommages significatifs. Ainsi, si une raideur musculaire est accompagnée d’urine foncée, une visite vétérinaire immédiate est d’autant plus importante.

Le traitement et le pronostic des conditions musculaires varient en fonction de leur sévérité et de leur cause primaire. Bien que les maladies génétiques soient incurables, les chevaux affectés ne doivent pas nécessairement être mis à la retraite. Effectivement, dans plusieurs instances, des modifications de l’entraînement et de l’alimentation, à planifier avec votre vétérinaire, peuvent permettre au cheval de retrouver une carrière sportive. Chez les races à risque, il est judicieux de vérifier si votre cheval est porteur de maladies génétiques musculaires avant de considérer la mise à la reproduction. 

Sophie Mainguy-Seers, DMV / diplômée de l’American College of Veterinary Internal Medicine (Large Animal Internal Medicine)