Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Déménagé à Farnham en 2007, Vincent Renaud s’est pris d’une passion particulière pour ses voisins, disséminés aux alentours : des pommiers de 100, parfois 200 ans, dont l’écorce est profondément ridée et le tronc, massif, est parfois fendu, mais qui tendent toujours leurs fruits.
Père de famille, photographe de métier et horticulteur amateur, Vincent Renaud s’est mis en tête de les sauver, ou du moins, de sauver leurs fruits. « Ces pommiers sont super résistants, ils ont survécu à tout, dit-il. Oui, certaines pommes seront parfois piquées ou « imparfaites », mais elles se sont rendues à terme sans produits chimiques. Aujourd’hui, l’industrie cherche des pommes rondes et brillantes – qu’on peut facilement transporter et entreposer. Mais ces vieux pommiers sont des vestiges d’un passé riche en biodiversité. Leurs pommes sont mieux adaptées à des petits vergers sans produits chimiques et où le transport n’est pas un enjeu. Mais certains arbres sont mourants. C’est urgent de les sauver. »
Rescapés d’une autre époque
Farnham est située à quelques kilomètres au sud de Rougemont et de Saint-Paul-d’Abbotsford, en Montérégie. « C’est l’un des berceaux de la culture de la pomme au Québec, explique le féru d’histoire. Saint-Paul-d’Abbotsford est la ville de Charles Gibb, une sommité dans notre histoire de la pomme. À la fin des années 1800, il a voyagé en Europe et a rapporté un grand nombre d’arbres fruitiers, notamment des pommiers. La région était l’équivalent d’un immense verger. Les arbres que je retrouve sont clairement des rescapés de cette époque. »
Ce passionné d’horticulture – il faisait ses propres bonzaïs à 6 ans – a entrepris ce travail de préservation il y a quatre ans. Sur son terrain de deux acres, il a réussi à collecter une centaine de variétés de pommes, un travail de longue haleine. Chaque hiver, il arpente la région pour retrouver ces arbres. « C’est plus facile de les distinguer quand il n’y a pas de verdure », dit-il. L’automne suivant, il retourne les prendre en photo, avec leurs pommes. L’hiver d’après, alors que les arbres sont en dormance, il récolte un greffon, soit un bout de branche. Au printemps, il installe les greffons sur d’autres plants, des porte-greffes.
Son verger, dont les fruits ancestraux devraient apparaître d’ici quatre ou cinq ans, comprend aussi des variétés retrouvées ailleurs au Québec, aux États-Unis et même en France. Parmi les variétés qu’il a retracées, on retrouve la Pomme-Pêche de Montréal, la Blue Pearmain, la Saint-Laurent d’hiver, la Saint-Laurent d’été et la Bourassa, pomme ancestrale réputée. « Elle était très populaire au Québec dans les années 1700 à 1900. L’un de ses deux parents était la Drap d’or, une variété apportée d’Europe aux débuts de la colonie. Plusieurs pommes ancestrales du Québec ont un parent Drap d’or. »
Comment arrive-t-il à identifier ces pommes? « Je me fie aux descriptions, et nous avons un groupe de spécialistes avec qui j’échange, explique-t-il. J’aimerais aussi éventuellement faire appel à un laboratoire de l’Université de Guelph, spécialisé dans ce type de recherche pour analyser l’ADN. »
Celui qui a créé le groupe Facebook Montre-moi ta pomme, dont l’objectif est d’aider le grand public dans l’identification et la préservation de ces anciens pommiers, caresse quelques projets. « Je pense à une micropépinière ancestrale que les gens pourraient venir visiter, ou encore pourquoi ne pas transformer ces fruits en alcool? » énumère cet ancien maître de chai pour un vignoble et verger.