Élevage 16 octobre 2017

Délimax discute fermement pour acheter Écolait

L’industrie du veau québécois devrait connaître un changement important dans les prochaines semaines : Délimax, l’un des deux géants de la production et de la transformation, devrait avaler son compétiteur Écolait.

En entrevue téléphonique, Alex Fontaine, de Délimax, affirme que « rien n’est encore fait », mais il confirme que des pourparlers ont lieu actuellement et que l’achat d’Écolait devrait se concrétiser d’ici un mois. En mettant la main sur son compétiteur de longue date, la famille Fontaine deviendrait le principal producteur et transformateur de veaux du Québec, avec 90 % du marché.

Prolacto, un groupe d’éleveurs indépendants, contrôlerait toujours environ 10 % de la production.

Rappelons que les Fontaine avaient acheté, en 2015, la totalité de la compagnie Montpak International, un important transformateur et distributeur de viande de veau et d’agneau. Le fait d’acheter Écolait permettra d’obtenir des gains de production émanant de la synergie des deux entreprises, précise M. Fontaine. L’acquisition d’Écolait se veut ainsi un geste stratégique visant à renforcer la compétitivité de Délimax, surtout avec l’arrivée de la viande de veau européen.

Féroce compétition

En vertu de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, le veau européen n’est plus freiné par des barrières tarifaires de 26,5 % depuis le 21 septembre dernier. La pression sur le marché québécois est déjà bien visible. « Leur viande rentre avec des prix inférieurs de 30 % sur certaines coupes. Oui, notre produit est de grande qualité, et oui, l’achat local est à la mode, mais avec son prix souvent moindre, le veau européen nous fait maintenant compétition », explique Alex Fontaine. Dès l’automne 2015, des transformateurs européens ont visité le Québec et distribué des échantillons de produits auprès de détaillants. Les premiers producteurs de veaux de l’Union européenne, les Néerlandais, mènent la charge. Depuis le début de l’année, leurs exportations vers le Canada ont déjà bondi de 14 %, souligne l’Association canadienne du veau. Cette dernière, les Producteurs de bovins du Québec (PBQ) de même que les transformateurs ont rencontré des gens du cabinet du ministre fédéral de l’Agriculture au début d’octobre pour dénoncer la « menace du veau européen ».

Des normes inéquitables

La filière québécoise du veau lourd juge déloyale la compétition de l’Union européenne. Là-bas, la réglementation qui interdit la commercialisation de veaux de moins de 10 jours réduit considérablement la mortalité des animaux. Les producteurs peuvent aussi y employer une gamme de médicaments qui sont défendus au Canada. « Ça fait une grosse différence : leur taux de mortalité atteint 2 % comparativement à 8 % ici. Les médicaments qu’ils utilisent leur procurent également des gains de poids plus élevés », ajoute M. Fontaine.

Les coûts liés aux médicaments confèrent un avantage concurrentiel de près de 50 $/tête aux éleveurs du Vieux-Continent. Ces derniers ont mis en place le logement collectif à la fin des années 1990 à l’aide de généreuses subventions de l’État, soulignent les PBQ. Pour leur part, leurs confrères québécois doivent convertir leurs bâtiments au logement collectif d’ici la fin de 2018. Les coûts de transition représentent 500 $/tête, un investissement important qui peut être reconsidéré avec la menace qui plane, font valoir les PBQ. « À armes égales, nous sommes compétitifs », insiste le président du comité mise en marché veaux de lait, Pierre-Luc Nadeau. Son organisation réclame une réciprocité des normes réglementaires de même qu’un programme de certification assurant le respect des normes de production canadiennes.