Vie rurale 8 septembre 2014

Tombés dans les pommes

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Tel que publié dans La Terre de chez nous

Le site est exceptionnel. Du sommet d’un promontoire, le regard embrasse d’un coup le verger et trois des neuf Montérégiennes, les monts Yamaska, Rougemont et Saint-Hilaire.

SAINTE-CÉCILE-DE-MILTON —  Bienvenue dans Les Vergers de la Colline à Sainte-Cécile-de-Milton où Michel Lasnier et son fils Marc-Antoine vous accueillent dans leur nouvelle cidrerie-bistro-boutique. Le duo de joyeux associés s’amuse à développer l’entreprise familiale, prenant plaisir à songer à la petite Ève qui représente les espoirs d’une relève.

« Je l’entraîne déjà à boire du jus de pomme », lance papa Marc-Antoine en rigolant. Plus sérieusement, il rapporte la « forte personnalité » observée par ses éducatrices en garderie. En tant que pomiculteur et maître cidriculteur, il admet qu’il a longtemps hésité avant de nommer son enfant Ève. Il n’a eu d’autre choix que de s’incliner devant la ferme décision de sa conjointe, qui avait choisi ce nom bien avant leur rencontre.

« Elle a juste deux ans, mais je pense qu’elle possède déjà la fibre entrepreneuriale », ajoute-t-il, notant qu’elle représente la 7e génération. À 34 ans, il connaît bien les piètres statistiques concernant les chances de réussite d’un transfert d’une entreprise familiale d’une génération à l’autre.

Michel atteste que sa petite-fille ira loin, « si elle part du bon côté ». L’homme d’affaires souhaite de tout cœur qu’un autre de ses descendants puisse prendre la relève un jour. À 58 ans, il se dit conscient qu’un enfant ne vient pas au monde avec le goût de relayer ses parents. Édifier une entreprise du genre, souligne-t il également, ne permet pas d’en bénéficier quotidiennement. De loin, il préfère laisser son exploitation en héritage, plutôt qu’un « tas d’argent » qui risque de s’envoler au vent.

« Tu ne peux vendre à ton fils au même prix qu’à un étranger, affirme Michel en regardant Marc-Antoine. Je suis convaincu que ça va être plus facile pour lui. Quand il est arrivé dans l’entreprise, nous avons cru en lui en gardant en tête qu’il voulait réaliser quelque chose de différent. On voit les résultats aujourd’hui. »

Le cidre

Marc-Antoine était inscrit au Cégep de Saint-Jean en génie mécanique quand les entrepôts sont rasés par un incendie en 1996. Lorsqu’il apprend que son père se cherche un nouvel actionnaire, il change aussitôt de cap et opte pour la gestion agricole. Après trois ans d’études, il entre officiellement dans l’entreprise en l’an 2000. Quel début de siècle!

Marc-Antoine entrevoit effectivement l’avenir de façon différente. Après une formation de cidriculteur, il entreprend la fabrication du cidre en 2002 à partir de la production des vergers.

Dix ans plus tard, sa quinzaine de produits différents, du rosé jusqu’au cidre de glace, est couverte de prix honorifiques. Juste l’an dernier, vins, cidres et hydromels confondus, l’exploitation a été la plus primée avec cinq distinctions à la Coupe des Nations et six à la Fête des vendanges. Quel honneur est le plus important?

« Aucun, répond-il. L’essentiel, c’est d’assurer une constance et de toujours se démarquer, année après année. »

De fait, Les Vergers de la Colline ne passent pas inaperçus à Sainte-Cécile-de-Milton. La nouvelle cidrerie, comprenant le bistro et la boutique et construite en bordure de la route 137, impose tant par sa taille et sa couleur que par son emplacement. L’intérieur, finement aménagé par Josée, conjointe de Michel, est soigné et spacieux. Outre le cidre, les pommes sont transformées sur place en gelée, pâtés et en irrésistibles tartes. On en met même dans les sandwichs et les soupes!

« Dans le fond, on en abuse », lance Marc-Antoine d’un ton amusé. Celui-ci reconnaît que son père lui a transmis beaucoup de rigueur, sans doute l’un des éléments qui ont jusqu’ici permis à l’entreprise de traverser le temps. Il ajoute que l’adaptation aux changements fait également partie de la culture familiale. Aujourd’hui, l’accent est mis sur la recherche de l’excellence et la formation de la quarantaine d’employés.

« Pour se rendre jusqu’ici, reprend Michel, on s’est axés sur la qualité. Notre personnel est impliqué dans le développement, la mise en marché et même la représentation. Des employés de la production se rendent dans les salons afin de recueillir les commentaires de la clientèle pour favoriser la créativité. »

Pommes fraîches

Michel dira que les belles récoltes se trouvent sans doute parmi les périodes les plus marquantes de son album de souvenirs. Il se rappelle tout spécialement le jour où des gens « tous habillés pareil » ont littéralement envahi son commerce. Une publicité dans un grand quotidien avait alors coïncidé avec un concours de jumeaux.

Michel rigole encore du jour où il a installé Marc-Antoine sur le bord de la rue avec un cageot de pommes à vendre. Il voulait monopoliser les énergies du jeune hyperactif « parce qu’il nous occupait trop ». Placé au centre du village, Marc-Antoine ne vendra que trois pommes durant son premier avant-midi, pour une recette totale de 45 cents! N’empêche, de l’expérience germera l’idée d’installer un kiosque en bordure de la 137, principal lien routier entre Granby et Saint-Hyacinthe.

« On s’est fait prendre au dépourvu, convient Michel. On a simplement mis un panneau sandwich avec la mention Pommes fraîches. C’est parti tout de suite. Il fallait être trois pour répondre aux clients. On faisait même travailler la visite. »

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