Volailles 4 avril 2024

La recherche en nutrition animale : un besoin crucial

L’optimisation de l’alimentation des volailles fait partie des principales préoccupations des éleveurs, soucieux à la fois de maximiser la croissance de leurs animaux et de réduire l’impact environnemental de leurs activités. C’est précisément l’un des domaines de recherche de Marie-Pierre Létourneau-Montminy, professeure au Département des sciences animales de l’Université Laval, dont les travaux ont permis de faire progresser les connaissances sur le sujet.

Ces dernières années, la chercheuse a dirigé divers projets sur l’alimentation animale, débutant avec les porcs pour se tourner ensuite vers les poulets, pour lesquels il existait un besoin crucial de données probantes à combler. Avec son équipe de chercheurs, elle s’est particulièrement intéressée à l’optimisation de nutriments comme le phosphore, le calcium et l’azote, entre autres. 

Marie-Pierre Létourneau-Montminy, professeure au Département des sciences animales de l’Université Laval, mène des recherches sur l’optimisation de l’alimentation des volailles.

« C’est important d’ajuster finement les apports en nutriments pour garantir le bien-être et la santé animale et aussi pour minimiser les répercussions environnementales », explique Marie-Pierre Létourneau-Montminy. Elle donne l’exemple du phosphore, dont les besoins ont été établis en 1994 sans jamais être révisés depuis, malgré l’évolution des connaissances en génétique animale. Cette situation pouvait entraîner une utilisation excessive de nutriments par les producteurs, ce qui s’avère inefficace et coûteux. De plus, l’utilisation excessive du phosphore minéral, une ressource non renouvelable, peut nuire à la durabilité à long terme de l’industrie avicole.

Développer un modèle

Pour optimiser l’utilisation des nutriments dans l’alimentation des poulets, les chercheurs ont lancé un projet de modélisation du phosphore et du calcium. Ils ont utilisé une multitude de données recueillies dans le cadre de méta-analyses, en plus de mener des essais sur les animaux pour générer des données supplémentaires nécessaires à l’élaboration du modèle. 

Une des découvertes de cette recherche est l’importance de la phytase, une enzyme qui favorise la digestibilité du phosphore. 

Des niveaux élevés de calcium ou de phosphore dans l’alimentation réduisent la capacité naturelle des poulets à synthétiser de la phytase. Il est donc important de réguler précisément ces apports.

Un excès de calcium entrave l’absorption du phosphore, entraînant des carences chez le poulet. De plus, un surplus de calcium incite les volailles à boire davantage, ce qui crée des litières humides susceptibles d’augmenter les concentrations d’ammoniac dans le poulailler. Cela a un impact sur le bien-être animal.

Marie-Pierre Létourneau-Montminy, professeure au Département des sciences animales de l’Université Laval

Grâce à ces résultats, les chercheurs sont en mesure de faire des recommandations d’alimentation plus précises à la fois pour les producteurs et pour les fabricants d’aliments.

Moins de nutriments, croissance supérieure

Une autre recherche menée par Mme Létourneau-Montminy et son équipe a permis de démontrer qu’il est possible de réduire de 20 % à 30 % les apports nutritionnels en phosphore et en calcium tout en préservant les performances de croissance des volailles. Pour parvenir à ces résultats, les chercheurs ont utilisé une stratégie de déplétion-réplétion. Le principe est simple : une phase de déplétion initiale, où les apports en phosphore et calcium sont réduits, est suivie d’une phase de réplétion où ces apports sont rétablis. « Malgré la diminution des apports minéraux, les volailles sont capables de maintenir, voire d’améliorer leur niveau de croissance », souligne Marie-Pierre Létourneau-Montminy. Cette approche présente également l’avantage de réduire les rejets de phosphore dans l’environnement.

Une collaboration internationale

Depuis l’an dernier, Marie-Pierre Létourneau-Montminy codirige le nouveau Laboratoire international associé Nutrition des animaux d’élevage et Modélisation pour des systèmes alimentaires durables (LIA Nutri-Mod). Ce laboratoire est le fruit d’une collaboration de longue date entre la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation de l’Université Laval, le centre de recherche de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) et l’université AgroParisTech, en France. 

La chercheuse avait déjà établi des liens solides avec cette université puisqu’elle y a effectué son doctorat en nutrition animale, mené en cotutelle avec l’Université Laval. Avec d’autres chercheurs français et québécois, Marie-Pierre Létourneau-Montminy participera à des travaux, dont un grand projet de recherche en aviculture visant la réduction des gaz à effet de serre dans l’élevage des volailles.