Maraîchers 8 novembre 2023

Courges du Québec : un bilan à double tranchant

Avec ses pluies très fréquentes, l’été 2023 a mis à l’épreuve les courges du Québec, et les commandes locales comme l’exportation se font plus timides. 

Alors que les dernières courges ont été récoltées, un bilan se dessine dans la province québécoise : les quantités entreposées sont moins importantes. Catherine Lefebvre, présidente de l’Association des producteurs maraîchers du Québec (APMQ), le vit à sa ferme et l’entend des autres producteurs : « On ne se rendra pas au 15-20 novembre comme habituellement. Les quantités ne sont pas là, on finit pratiquement un mois à l’avance. » 

La qualité des récoltes est elle aussi en jeu. « Ce qui se passe, explique-t-elle, c’est que ce qu’on a ramassé – ce qui est entreposé –, ce n’est pas nécessairement la qualité habituelle qu’on a à ce moment-ci de l’année. » 

À la ferme de Catherine Lefebvre, les récoltes de courges buttercup ont été plus affectées par la pourriture. Photo : Gracieuseté de Catherine Lefebvre

Un bilan complexe 

Si un portrait différent se dessine de ferme en ferme, la région de Lanaudière semble toutefois avoir été plus durement affectée que la Rive-Sud de Montréal, par exemple. « Dans Lanaudière, indique Mme Lefebvre, c’est les quantités qui ne sont vraiment pas là avec les pluies diluviennes qu’ils [les producteurs] ont eues. C’est comme si les fleurs étaient tombées et que le fruit n’avait pas poussé par la suite. » Pascale Coutu, copropriétaire de La Courgerie, à Sainte-Élisabeth, le confirme. Moins de fleurs ont pu être pollinisées cette année parmi les 300 variétés plantées à la ferme : « On parle d’un champ à 50 % de sa capacité. […] On a eu de tout, mais en plus petites quantités. »

À la ferme de Mme Lefebvre, les récoltes de buttercup ont été plus affectées par la pourriture, mais pour le producteur voisin, c’est plutôt la courge poivrée qui se révèle difficile à conserver en entrepôt. Les résultats varient d’un endroit à l’autre, en raison du type de sol de chaque endroit, croit Mme Coutu, qui a remarqué des différences sur sa propre terre en fonction du drainage naturel.

Les chiffres avancés par de nombreux producteurs laissent croire que la saison de la courge sera plus brève cette année. En date du 26 octobre, La Courgerie est parvenue à vendre toutes ses récoltes, uniquement disponibles sur place. La fréquentation de la ferme a certes été affectée, mais Mme Coutu précise que c’est surtout lié à la météo, peu invitante pour l’autocueillette.

Les gens venaient quand même, mais appelaient avant de venir pour vérifier. Ce qui les empêchait de venir, c’est la pluie.

Pascale Coutu, copropriétaire de La Courgerie, à Sainte-Élisabeth

Un marché chamboulé

En dehors des circuits courts, la situation s’avère plus complexe pour la commercialisation des courges du Québec. « Les commandes sont vraiment beaucoup moins là cette année, que ce soit au local ou aux États-Unis », indique la présidente de l’APMQ. Ainsi, en épicerie, une absence précipitée de courges pourrait ne pas refléter la situation réelle en entrepôt, confirme-t-elle.

C’est dommage, mais quand on le dit trop tôt que la saison n’est pas belle, des fois, on se ramasse que, oui, les quantités sont moindres, mais on n’a plus de commandes non plus. C’est comme un couteau à double tranchant.

Catherine Lefebvre, présidente de l’Association des producteurs maraîchers du Québec

Le Centre d’interprétation de la courge, dans les Laurentides, n’accorde plus d’entrevues cette année, jugeant que le portrait général nuit aux producteurs, comme eux, qui ont été moins affectés.

Quoi qu’il en soit, les récoltes de 2023, comme celles de 2022 (touchées par le virus de la mosaïque), ne correspondent pas à ce que l’on observe normalement. « On est dans l’adaptation aux changements climatiques », résume Mme Coutu. Si les producteurs apprennent à s’adapter aux épisodes de sécheresse, les excès de pluie, eux, demeurent un défi plus difficile à surmonter.