Maraîchers 22 avril 2024

Après une saison à oublier, les maraîchers redémarrent la machine

SAINT-MICHEL – Bien qu’ébranlé par les difficultés qu’il a connues la saison passée, Éric Rémillard est de retour au champ pour la nouvelle saison, prêt à miser, comme à son habitude, sur les primeurs de carottes nantaises. Malgré le risque que ça peut représenter advenant des nuits de gel printanier, ce producteur de Saint-Michel, en Montérégie, a commencé ses semis tôt en avril, en s’armant toutefois de prudence.  

« On sème de plus petites superficies qu’à l’habitude, les premières semaines. Je pense couper le risque du tiers, mais juste au début. Après, on verra », a-t-il expliqué à La Terre lors d’une visite à sa ferme, le 9 avril. 

S’il compte, dans l’ensemble, cultiver les mêmes quantités de légumes que les années antérieures et garder un plan de semis similaire, le producteur admet être « un peu sur les breaks », ayant encore en tête les pertes majeures encaissées la saison dernière. La pluie incessante de juillet a grandement nui à ses récoltes de carottes et à leur conservation en entrepôt. 

« Les risques, on les calcule peut-être un peu plus. L’année passée, ç’a été très difficile. Pas juste financièrement, mentalement aussi. Peut-être qu’on l’a encore trop frais en mémoire. On sait que les pertes capitales, ça peut arriver rapidement », souligne-t-il.

L’engouement du retour du beau temps

Malgré tout, Éric Rémillard préfère voir le verre à moitié plein et se dire que la saison en cours ne pourra pas être pire que la précédente. Plusieurs autres maraîchers qui en ont vu de toutes les couleurs en 2023 semblent dans le même état d’esprit. C’est le cas de Maxime Vaes, de Lavaltrie, dans Lanaudière, qui s’est frotté à deux mois de pluie, à de la grêle et à une tornade, mais qui préfère tourner la page et aller de l’avant. 

« On y a goûté en tabarouette, sous tous les aspects, pendant deux mois. Si j’avais fermé les livres au mois de juillet et que j’avais arrêté de cultiver, j’aurais été en meilleure posture que présentement. Mais on n’est pas des lâcheux; on veut aller jusqu’au bout, tout le temps », témoigne celui qui garde le même plan de semis que les années antérieures.

Ça fait au-dessus de 70 ans qu’on fait ça. On a toujours réussi. On ne changera pas tout ce qui s’est fait dans le passé, parce que ç’a mal été une année.

Maxime Vaes

Olivier Barbeau, producteur à Saint-Michel, décrit les maraîchers comme d’« éternels optimistes », qui retrouvent la passion dès le retour du beau temps, propice aux premières sorties de tracteurs. « Il y a toujours un petit engouement qui revient. On dirait qu’on oublie la dernière année. On a rechargé les batteries pendant l’hiver et on redécolle ça », lance le producteur qui, chaque année, est parmi les premiers à semer des oignons verts. 

À l’Association des producteurs maraîchers du Québec, la directrice générale adjointe, Catherine Lessard, affirme, de son côté, percevoir à la fois plus de morosité qu’à l’habitude de la part des agriculteurs et une volonté de ceux-ci de ne pas lâcher. « On sent qu’ils sont stressés, qu’ils se disent qu’ils ne seraient pas capables de prendre une autre année comme celle de 2023. Ils ont envie de se refaire, cette année, on dirait », ­constate-t-elle.