Grandes cultures 26 janvier 2024

Une année difficile à prévoir pour la commercialisation des grains

SAINT-HYACINTHE – « Ce sera une année très difficile pour les grains en 2024 », a prévenu Jean-Philippe Boucher, le 15 janvier, lors d’une conférence prononcée à Saint-Hyacinthe à l’invitation de l’Association des commerçants de grains du Québec. 

L’analyste, qui est propriétaire des Services Grainwiz, a mis la table en expliquant le changement de régime dans la commercialisation du maïs. Il y a une vingtaine d’années, a-t-il rappelé, « les États-Unis, c’est tout ce qu’on surveillait ». Les Américains étaient ainsi responsables de plus de 60 % des exportations de maïs au monde, une proportion qui a maintenant fondu à 26 %. 

C’est le Brésil qui a pris du coffre et qui est même devenu, depuis l’an dernier, le plus gros joueur avec 28 % des exportations mondiales, a mentionné M. Boucher. Semant présentement leur maïs, les Brésiliens pourraient avoir une incidence considérable sur les prix advenant une très bonne récolte. 

« Et l’Ukraine n’a pas baissé tant que ça », a fait valoir l’analyste, et ce, malgré la guerre. Il précise que les Ukrainiens ont récolté 27 millions de tonnes (Mt) en 2022 contre une moyenne de 29 Mt pour les 10 années précédentes. La projection de 30,5 Mt de maïs pour 2023 représente beaucoup de grains, a-t-il souligné. 

La production mondiale de maïs a grimpé de 7 %, tandis que la consommation, elle, a augmenté de 4 %. Compte tenu de ce contexte global, les exportations américaines sont plus faibles présentement que leur moyenne des cinq dernières années. Les Américains doivent vendre leur maïs moins cher pour le sortir du pays, a dit M. Boucher, rapportant des prix de vente de 205 $ US la tonne contre 227 $ US au Brésil. 

Au Québec, la production québécoise de maïs, en baisse en 2023, a été compensée par une production canadienne record. Tout cela conduit à une tendance baissière du prix du maïs, a affirmé Jean-Philippe Boucher, qui a diminué ses projections. Il anticipe désormais une fourchette entre 230 et 270 $ la tonne et conseille de profiter des rallyes haussiers.

Plus serré dans le soya

Dans le soya, le Brésil (encore lui!) est en tête avec 58 % des exportations, suivi des Américains avec 28 % des exportations. La production mondiale a augmenté de 6 % et la consommation, de 5 %. Les stocks de soya sont serrés, particulièrement aux États-Unis, tandis que les Brésiliens sont agressifs avec leur programme d’exportation qui offre au marché des prix plus bas, soit de 434 $ US la tonne comparativement à 485 $ US pour les Américains, a énuméré M. Boucher. 

Sans surprises, les exportations de soya des États-Unis sont en deçà de leur moyenne des dernières années. Par contre, le biodiesel a la cote. « Ça pourrait amener quelque chose d’intéressant », a commenté l’analyste. 

Le soya est présentement dans une tendance baissière. « Au Québec, on reste dans des prix historiquement élevés, mais on vient de prendre une bonne débarque. Les bases ne se raffermissent pas; les acheteurs n’ont pas faim », juge-t-il, anticipant un prix cible entre 600 et 725 $ la tonne. Il conseille de profiter des rallyes pour effectuer des ventes avant que les intentions d’ensemencement des États-Unis soient diffusées vers la fin mars. 

Le blé sous-estimé?

Avec une production mondiale de blé qui a diminué de 0,5 %, une consommation qui s’est accrue de 1,1 % et une disponibilité de la ressource à son plus bas en 10 ans, Jean-Philippe Boucher comprend mal pourquoi les prix manquent de vigueur. Il anticipe une fourchette de prix entre 260 et 300 $ la tonne.