Portraits 1 mars 2024

Quand l’amour de la terre mène à tout

Elles partagent des ancêtres et le même patronyme. Elles ont toutes deux grandi à Shigawake, un hameau de la Baie-des-Chaleurs, en Gaspésie. Mais les similitudes ne s’arrêtent pas là pour Shaina et Jennifer Hayes. Elles sont toutes deux animées par l’amour de la terre.

Cet amour s’exprime toutefois de façon différente pour ces deux « petites cousines », séparées par deux décennies. Alors que Jennifer est présidente de la Commission canadienne du lait et copropriétaire d’une ferme en Gaspésie, Shaina vient tout juste de sortir son deuxième album, Kindergarten Heart, aux accents country folk. Une série de spectacles suivra au cours des prochains mois.

Détail important : Shaina Hayes, 32 ans, est propriétaire depuis 2020 d’une petite ferme de cinq acres (2 hectares) à Mont-Saint-Grégoire, en Montérégie. Elle y a fait de la culture maraîchère, des paniers bios plus précisément, au cours des dernières années. 

Pour cette auteure-compositrice-­interprète, ses deux passions ne sont pas incompatibles. Le travail de la terre et la musique sont tous deux un terreau fertile pour la création, estime celle qui a quitté, à l’âge de 16 ans, sa Gaspésie natale, où elle a grandi dans une ferme laitière. 

J’ai réalisé que les raisons pour lesquelles je fais de l’agriculture sont les mêmes que celles pour lesquelles je fais de la musique. Ça fait un peu travailler les mêmes muscles, ceux de la création. Pour la ferme, il y a, par exemple, les plans de plantation à faire et les paniers de légumes à composer.

Shaina Hayes

En agriculture comme en musique, il y a une saison pour tout, fait-elle remarquer. « En musique, il y a la saison pour l’écriture, la saison pour pratiquer et la saison des spectacles. Il y a vraiment des vagues de tâches différentes. Et c’est un mode de vie que j’aime. »

En pause… ou presque

Depuis l’an dernier, Shaina Hayes met toutefois beaucoup moins les mains dans la terre. « Quand j’ai commencé avec la ferme, c’était la pandémie et il n’y avait pas trop de spectacles. Je pouvais travailler sur ma musique durant l’hiver, dit-elle. Mais avec les spectacles et les festivals qui ont repris, et qui sont surtout l’été, j’ai dû faire un choix. »

Elle a ainsi fait le choix de louer sa terre à sa demi-sœur, Meghan Clinton, qui y a démarré la ferme florale Bliss Bird. 

La carrière musicale de Shaina Hayes étant moins compatible avec ses activités de maraîchère pour le moment, elle a loué sa terre à Meghan Clinton, qui y a démarré une ferme florale. Photo : Facebook/ Bliss Bird Flowers  

Anecdote : Meghan Clinton a fait le parcours inverse de Shaina Hayes. Elle a, pour sa part, embrassé l’agriculture après avoir travaillé dans le domaine de la musique, comme agente d’artistes.

Shaina Hayes, qui a fait des études en sciences environnementales et agricoles à l’Université McGill, aimerait néanmoins cultiver à petite échelle quelques légumes (poivrons, courges, piments forts, etc.) au cours de l’été à venir pour quelques restos montréalais avec qui elle a développé des liens. 

Dans un monde idéal, elle aimerait arriver à concilier ses deux passions. « Ça me manque beaucoup de travailler à la ferme, d’être dehors et d’avoir des interactions avec les clients pour les paniers, explique l’artiste. J’adore cultiver des légumes. C’est très satisfaisant. »

Jennifer Hayes est présidente de la Commission canadienne du lait depuis le 23 décembre 2021. Elle a été nommée pour un mandat de quatre ans. Photo : Gracieuseté de Jennifer Hayes

Toujours prête à s’engager

La présidente de la Commission canadienne du lait (CCL), Jennifer Hayes, dit vouer beaucoup d’admiration à sa petite cousine, Shaina Hayes. « Elle capte notre rythme de vie gaspésien dans sa musique, et nous sommes tous très fiers d’elle », affirme-t-elle. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la communauté de Shigawake, petite localité d’un peu plus de 300 habitants, nichée entre Port-Daniel et Paspébiac, est tissée serrée. 

Copropriétaire avec son père et son oncle d’une ferme de bovins laitiers et de bovins de boucherie, Jennifer Hayes dit avoir compris tôt qu’il ne faut pas avoir peur de s’engager, « si on veut garder notre communauté dynamique et vivante ».  

C’est entre autres dans cet esprit qu’elle a souhaité œuvrer au sein de la CCL, à partir de 2017. Elle en occupe la présidence depuis décembre 2021. Et elle se veut rassembleuse.

Si on veut un futur durable pour l’industrie laitière au Canada, on doit travailler ensemble. Peut-être qu’on ne pense pas aux petites régions rurales pour amener cet aspect-là. Mais en Gaspésie, qui est une région plus dévitalisée, on est très habitués de travailler ensemble et de mettre toutes les parties autour de la table pour trouver des solutions.

Jennifer Hayes

À une autre époque, celle qui est mère de deux adolescentes a en outre travaillé pour la MRC locale comme agente de revitalisation auprès de certaines municipalités dévitalisées. Elle continue par ailleurs d’en accompagner certaines à titre de consultante. 

Visiblement, Jennifer Hayes, 51 ans, ne craint pas de porter plusieurs chapeaux. Son seul critère : trouver du plaisir dans ses différents rôles. « La joie que j’éprouve quand j’obtiens des résultats, c’est ce qui me donne de l’énergie pour continuer », conclut-elle.