Réflexion sur la résilience des fermes

L’automne est bien installé et les récoltes sont avancées. Dans toutes les régions, les saisons printanière et estivale ont apporté leur lot de surprises. L’article Autopsie d’une pitoyable météo en 2023, du journaliste de La Terre de chez nous Martin Ménard, le 6 octobre dernier, décrivait bien la variabilité que dame Nature nous impose. Du plus loin que l’on se souvienne, ces phénomènes météorologiques ne sont pas nouveaux et nous savons aussi qu’ils reviendront affecter nos rendements. Un autre facteur qui frappe fort cette année est la hausse des taux d’intérêt. 

L’addition de ces deux facteurs incontrôlables chambranle la solidité de la structure de notre gestion d’entreprise basée trop souvent sur une rentabilité à court terme. Nous voulons faire plus de lait, plus de gain chaque jour. Plus de grains, de fruits, de légumes à chaque saison de culture. Nous cherchons l’hybride (ou cultivar) le plus performant, le plus de lait à chaque lactation, le meilleur gain à chaque lot. Parfois, trop souvent, le désir d’augmentation de rendement affecte la rentabilité réelle de la production. L’année 2023 tend à suivre la tendance de 2022, où même si les revenus monétaires d’exploitation avaient augmenté de 14,8 %, les dépenses d’exploitation augmentant de 21,2 % ont fait en sorte que les revenus nets réalisés ont diminué de 9,5 % par rapport à 2021 (Revenu agricole net, Statistique Canada, 25 mai 2023). Assurément, il y a des facteurs influençant notre rentabilité qui sont plus faciles à contrôler que d’autres.

Sur une note plus philosophique : « Contrôle ce que tu peux contrôler, influence ce sur quoi tu peux avoir de l’influence et accepte, lâche prise sur ce que tu ne peux pas contrôler et aie la sagesse d’en faire la différence. » Ce principe semble simple, mais il n’est pas toujours évident de faire ces différences dans la vie de tous les jours. D’où l’importance de prendre du temps pour regarder notre entreprise autrement et requestionner l’ensemble de nos pratiques, de nos objectifs et de nos procédés. De prendre le temps d’échanger avec d’autres producteurs, même de productions diverses, afin de défier nos visions et sortir de nos paradigmes. 

Pour ne donner qu’un exemple d’une pratique que j’ai découverte cette année : après la récolte de maïs d’un voisin, un producteur bovin envoie ses animaux sur les terres de ce voisin. Ils mangent les restants de la batteuse pendant presque deux mois. L’un gagne en baissant ses coûts d’alimentation, l’autre en enrichissant ses terres de fumier. Très simple et efficace, mais il fallait y penser! 

Nous ne pouvons contrôler les précipitations et la sécheresse, mais pouvons-nous donner les outils au sol, à ses micro-organismes, aux racines afin de les aider à retenir ou à laisser passer l’eau? Nous ne pouvons contrôler le vent, mais pouvons-nous planter des arbres pour protéger nos champs? Des arbres à noix ou fruitiers qui apporteraient des pollinisateurs; pourquoi pas? 

Une saison plus tranquille s’installe. C’est un excellent moment pour prendre du recul et s’attarder à ces réflexions. Et vous, quelle est votre situation actuelle par rapport aux différents risques? Comment pouvez-vous l’améliorer? Comment la rendre plus résiliente?

Bonne réflexion!