À cette période de l’année, bon nombre de personnes font un bilan des enjeux rencontrés au cours de la saison estivale : situation financière, perte de récolte, météo défavorable, difficulté de recrutement de main-d’œuvre, etc. Bien souvent, les gens se basent sur ce type de données pour évaluer comment ils se portent. C’est normal, me direz-vous; au temps et aux efforts investis dans leur entreprise, ils ne font qu’un avec celle-ci. Comme professionnelle en relation d’aide, cette situation me préoccupe.

Lorsque je discute avec Robert, producteur bovin et de grandes cultures, je le questionne pour savoir comment il va. Il me parle du prix obtenu pour la vente de ses veaux à l’encan, du manque de foin pour les prochains mois et du fait que ses cultures ne sont pas rentables, cette année. Moi, ce que je vois, c’est un homme investi dans son travail qui a donné tout ce dont il était capable dans les derniers mois pour que la saison estivale soit profitable pour son entreprise. Évidemment, les heures, il ne les a pas comptées; des jours de congé, il n’en a eu aucun. Malheureusement, ces éléments ne font pas partie du bilan qu’il dresse de sa saison.

Des bilans, plusieurs personnes en font. Au sein des entreprises, nous sommes habitués à porter une attention particulière aux rendements, à l’efficacité, etc. C’est important de le faire pour assurer la pérennité et la viabilité de la ferme. Cependant, c’est selon moi une erreur de se concentrer uniquement sur ces aspects du métier. Votre bien-être professionnel ne dépend-il que de ceux-ci? Qu’advient-il lorsque le tableau dépeint est fort peu encourageant? Cela augmente le niveau de stress et d’anxiété, cela augmente les risques d’épuisement et peut générer de la souffrance émotionnelle. Aujourd’hui, j’ai envie de vous proposer un moyen d’atténuer tout ça. 

Prendre un pas de recul sur une situation pour en tirer un bilan, c’est une bonne habitude à prendre. Il est souhaitable de le faire en prenant en considération l’ensemble des facteurs qui l’influencent. Ainsi, il ne s’agit pas que d’une question mathématique. Si les résultats escomptés ne sont pas au rendez-vous, ce n’est pas forcément parce que vous devez travailler plus ou plus fort. Vous êtes bien placés pour savoir que les impondérables sont nombreux en agriculture. Ce que j’essaie de vous illustrer, c’est que nous devrions prendre l’habitude d’inclure un volet personnel dans nos rétrospectives professionnelles. Il est possible que vous en veniez au constat que vous avez donné votre 100 % et que les résultats obtenus ne sont pas en cohérence avec le degré d’implication et les efforts déployés dans votre travail. Néanmoins, vous avez sans doute vécu certaines réussites, certains accomplissements. Avez-vous fait de votre mieux? Il s’agit là d’une question capitale. Toute son importance réside dans le fait qu’elle concerne une portion de votre métier sur laquelle vous avez du pouvoir, et ça, ça vaut de l’or!

De plus, le fait de vous poser cette question permettra de mettre certaines choses en perspective et de réfléchir aux changements que vous souhaitez mettre de l’avant. Cela pourrait même augmenter votre niveau de satisfaction au travail, en plus de vous donner confiance en vous et d’alimenter votre sentiment de compétence.

L’idée n’est pas de sombrer dans la « positivité toxique », qui pousse les gens à faire abstraction des éléments négatifs ou difficiles de leur existence pour se concentrer uniquement sur ce qui est positif. On devrait plutôt apprendre à considérer la totalité des facteurs influençant notre travail, afin d’avoir une meilleure vue d’ensemble. Reconnaître nos réussites et nos fiertés au quotidien, et ce, même dans un contexte professionnel exigeant. Alors, la prochaine fois que quelqu’un vous demandera « pis, comment tu vas? », pensez à nuancer votre réponse.  

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