Je ne sais pas vous autres, mais moi, il m’arrive de croiser des personnes qui ont, en bon langage commun, le « piton de la switch collé ». Vous savez, ces gens qui ne prennent pas le temps de respirer tellement ils parlent. Lorsque ces verbomoteurs ont, de surcroît, un tempérament irritable et impulsif, c’est un cocktail assez explosif. Bien souvent, ces « verbeux » sont atteints de surdité sélective. En effet, ils ne portent attention qu’à ce qu’ils veulent bien entendre. On est davantage dans une conversation à sens unique. En connaissez-vous? J’ai parfois l’impression qu’il y en a plus, en contexte postpandémique. Peut-être que l’isolement social dans lequel la population a été placée a influencé négativement nos habiletés humaines?

Pourtant, l’écoute est à la base des interactions, de ­véritables rencontres entre deux êtres humains. Lorsqu’elle est absente, un mur de béton se dresse alors entre eux et le pont de la ­communication s’écroule, abîmant parfois gravement et ­indéfiniment la relation.

Lorsqu’on écoute pour répondre et non pour comprendre, la fermeture s’installe et le dialogue est inexistant. On pense uniquement à « fermer la trappe » à l’autre plutôt que de prendre le temps de vraiment bien l’écouter.

J’ai le goût de vous raconter l’histoire d’Arnold, qui a un emploi en milieu agricole dans une ferme laitière. Il travaille pour son neveu, Éric, qui est « un verbeux » bouillant. Il a la mèche très courte. Chaque matin, il « déboule » à Arnold les tâches à exécuter dans la journée et comment il devrait exactement les faire. Dès que son oncle lui demande des précisions ou qu’il tente de lui expliquer sa propre méthode, Éric lui coupe la parole et lui répond : « Je t’ai déjà tout expliqué, c’est quoi que tu comprends pas, tabarnak! » Chaque fois, Arnold paralyse, fige. Il a l’impression de ne pas être considéré comme intelligent et capable de réfléchir. Il se sent incompétent, dévalorisé, fautif, lui qui n’est pourtant pas un débutant. La sœur d’Éric observe la scène à distance et secoue la tête de découragement. À la première occasion, elle tente de l’encourager et lui dit à voix basse : « Fais-toi en pas mononcle, c’est un gros criss de con. Il est de même avec tout le monde ». Arnold aimerait que son neveu fasse preuve d’écoute et de respect, qu’il montre de l’ouverture à essayer d’autres manières de faire, de temps en temps.

Maintenant, je vous propose de regarder tout ça d’un peu plus près pour mieux comprendre l’importance de l’écoute. En communication, la notion émetteur/récepteur est fondamentale. Lorsqu’on écoute pour répondre et non pour comprendre, la fermeture s’installe et le dialogue est inexistant. On pense uniquement à « fermer la trappe » à l’autre plutôt que de prendre le temps de vraiment bien l’écouter. 

Il nous arrive à toutes et tous d’être irritables certaines journées. Mais, lorsque cet état perdure dans le temps, il est important de se poser la question : suis-je stressé, fatigué? On doit s’arrêter un moment pour revenir à nos besoins de base : ai-je besoin de repos, de sécurité, de vacances? Qu’est-ce qui me pousse à vouloir écraser et humilier l’autre? Le canal de communication est aussi très important. C’est une voie, un moyen par lesquels nous allons communiquer notre message. Selon le contexte, le temps disponible et le sujet à aborder, il est primordial d’évaluer où et quand établir un contact avec l’autre personne. Un exercice d’introspection, avec un professionnel spécialisé en gestion des émotions (colère, etc.), pourrait s’avérer pertinent pour y voir plus clair et amorcer un processus de changement. 

Et si vous vous reconnaissez dans le vécu d’Arnold, il est important de ne pas vous emmurer dans le silence. Parce que le silence et les non-dits vous détruisent à petit feu. Des facteurs de protection devront donc être mis en place. Vous avez le droit d’être reconnus dans vos besoins de respect, de dignité et de compétence. Une travailleuse de rang peut vous aider, vous outiller et vous soutenir, pour faire cesser la violence d’un Éric et appliquer la tolérance zéro envers toutes formes de violence.  


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