Vie rurale 14 octobre 2022

Transport d’animaux : « J’encourage toutes les femmes à le faire »

Manon Duncan recule son gros camion prudemment dans la cour des Encans de la ferme, à Saint-Hyacinthe, elle qui conduit son mastodonte depuis seulement trois mois.

« C’est un changement de carrière; j’étais dans la restauration et dans l’hôtellerie à Montréal. À 53 ans, j’ai décidé de changer et je suis vraiment contente de ma décision. Je vois de beaux paysages, je suis libre. Et c’est moins difficile que je pensais, de conduire un truck. J’encourage même toutes les femmes à le faire », dit la sympathique camionneuse.

SAINT-HYACINTHE – Travaillant pour un transporteur d’animaux, elle se rend dans les encans ou chez des agriculteurs avec qui elle développe une belle complicité. Le métier est toutefois exigeant. « Parfois, tu as des taureaux. Ce n’est pas évident; le producteur te les amène au trailer. Ensuite, c’est à toi de le faire rentrer et de fermer tes portes. Certains sont entêtés », décrit-elle. 

Pourquoi avoir justement choisi le transport d’animaux? « J’ai essayé le dry box [remorque fermée] et je n’ai pas aimé ça. Il y a beaucoup trop d’attente. Ça peut prendre trois ou quatre heures pour se faire charger ou décharger. Avec les animaux, il y a moins d’attente », compare-t-elle. Amener des êtres vivants à destination représente également un défi supplémentaire qui la motive. « Je prends ça à cœur. Je ne veux pas en perdre un seul. Mais quand ça arrive, j’ai de la peine, c’est certain. C’est comme un échec, j’essaie de savoir pourquoi », partage-t-elle. 

Chez son employeur, Transport P.A.B. Bouffard, la responsable de suivi de trajet, Isabelle Vanasse, assure que les bons conducteurs (ou conductrices) de remorque de bétails font la différence. « Certains sont plus consciencieux. Ils vont prendre soin de bien les charger, et ils vont arrêter de temps en temps pour vérifier si tout est correct. Ils vont en perdre beaucoup moins [d’animaux] à l’abattoir », explique-t-elle, spécifiant que ce n’est toutefois pas évident de trouver des candidats. « On met des annonces et ça n’attire pas fort. C’est sûr que du livestock, c’est imprévisible. Il y a des surprises tous les jours pour les chauffeurs. Il faut du monde allumé », affirme Mme Vanasse. Si plus de femmes s’intéressent à la profession, « tant mieux », ajoute la responsable.

La dream team

Manon Duncan conduit son camion seule, mais parfois, elle forme un duo avec son conjoint, également camionneur. Le couple peut ainsi rouler jour et nuit.

Qui est le meilleur conducteur entre les deux? « C’est moi, la meilleure, dit-elle en riant. Mais on aime ça ensemble, lui fait la nuit et moi, le jour. On a la télé et le micro-onde dans le camion. On se lave dans les truck stops. En Ontario,
où on livre des animaux, ils nous appellent la dream team, parce qu’on arrive avec le sourire. »

Mme Duncan espère travailler ainsi encore longtemps et, éventuellement, parcourir les États-Unis à bord de son camion. « Avant, je devais me maquiller et porter des talons hauts pour travailler. Maintenant, je voyage en faisant de l’argent. Et les animaux ne te jugent pas, eux autres. J’aime bien ça! »