Transformation 3 janvier 2024

La filière du chanvre industriel n’a pas décollé

Le 2 octobre 2019, La Terre a publié une série d’articles sur le décollage de la filière du chanvre industriel, sauf qu’en contactant les mêmes intervenants pour un suivi, force est d’admettre que la filière n’a jamais vraiment décollé.

« J’ai besoin de 5 000 hectares en culture de chanvre juste pour faire virer l’usine d’Eko-Terre », affirmait à l’époque l’agronome Olivier Lalonde, qui était à l’emploi de cette compagnie. Celle-ci souhaitait utiliser le chanvre comme fibre textile pour des uniformes de travailleurs, notamment. 

Cinq ans plus tard, Eko-Terre n’a fait aucune transformation de fibre de chanvre au Québec et compte maintenant développer un tel projet ailleurs au Canada. « On a tout calculé et ici, au Québec, on ne croit pas que les agriculteurs soient capables de produire une fibre à un prix raisonnable, dit le directeur de l’entreprise, Ghislain Bouchard. Je ne leur en veux pas, mais c’est trop élevé pour qu’on puisse la revendre et trop élevé pour qu’on investisse des millions de dollars dans des équipements nécessaires pour transformer la fibre. »

Il estime que les gens ne réalisent pas le potentiel et l’utilité d’une fibre naturelle comme le lin ou le chanvre. « Au Québec, on est en retard solide. De notre côté, on a des projets assez avancés, mais la seule chose que je peux dire, c’est que quand on va se décider à faire de gros investissements, ce ne sera plus au Québec, mais dans l’Ouest canadien, où les agriculteurs peuvent faire une fibre de chanvre moins chère et en plus grands volumes », mentionne-t-il.  

En 2019, l’un des articles faisait également état des grandes ambitions d’une entreprise qui désirait encadrer la production de chanvre industriel et en assurer une première transformation. Il s’agissait d’Agrofibres, cofondée entre autres par quatre agrocentres, des entreprises spécialisées dans la vente d’intrants agricoles. Or, cette usine n’est plus en production et a été démantelée. 

Certification imminente

Finalement, La Terre rapportait, il y a cinq ans, les propos optimistes de Michel Provencher, directeur de Nature Fibres, une entreprise qui désirait transformer la fibre de chanvre pour en faire un isolant destiné à l’industrie de la construction. M. Provencher a répondu par un long rire lorsqu’il a été contacté, le 8 décembre, pour savoir où en étaient ses ventes de matériaux isolants à base de chanvre. « Ç’a été mis en attente! On avait extrêmement de misère à le commercialiser, car nous n’avions pas la certification du code du bâtiment. En fait, il n’existait aucun guide technique ou une norme pour un produit végétal. Il a fallu envoyer des échantillons et tout. On devrait justement avoir la certification d’ici deux semaines. À partir de 2024, on devrait être legit et commencer à vendre », explique celui qui s’approvisionne en fibres de chanvre de l’Ouest canadien et de l’Europe. Il priorisera une fibre locale si elle est disponible.

Suivi de l'édition du 2 octobre 2019