Relève 17 décembre 2024

Un projet de relève plus rentable avec des cèdres que du maïs-soya

SAINT-HYACINTHE – L’adage dit qu’il faut parfois penser en dehors de la boîte. Voilà exactement ce qu’ont fait David et Charles Beaudry, au début de la vingtaine. Ils ont diversifié la ferme familiale en démarrant un commerce de conifères ornementaux. 

« Nos parents ont une ferme ovine et on voulait reprendre la ferme, mais avec tous nos frères et soeur, on était trop de relèves pour la taille de l’entreprise. On a regardé pour acheter une terre et faire du maïs-soya. Nous l’avons calculé, mais avec le prix des terres ici, ce n’était pas rentable », dit David, qui vient d’obtenir son diplôme d’agroéconomiste. 

Ce dernier ajoute qu’en production horticole ornementale, les marges bénéficiaires plus élevées permettent de rentabiliser l’achat d’une terre. « La production d’arbres, ça nous rejoignait », raconte Charles, qui détient un diplôme universitaire en agronomie. « On voyait les villes qui veulent se verdir, qui veulent amener plus de végétation et on s’est dit qu’il y avait un marché. Nos parents connaissent un producteur de cèdres. Alain Brodeur nous a montré ce qu’il faisait et on s’est dit : ‘‘C’est ça qu’on veut faire de notre vie.’’ »

C’est ainsi qu’en 2021, ils ont acquis une terre totalisant 36 hectares en culture à Saint-Paul-d’Abbotsford, en Montérégie. Une section a été plantée en cèdres dès l’année suivante, offrant une première récolte en 2024. Aujourd’hui, leur terre est déjà plantée à 50 % de conifères et elle entrera dans son rythme maximal de production à sa huitième année. Mais déjà, les Beaudry font leur nom.

David et Charles Beaudry ont diversifié la ferme familiale en lançant une plantation de conifères ornementaux. Photo : Martin Ménard/TCN

Déterminés à se tailler une place

Au-dessus du kiosque de la Pépinière Arbora à l’Expo Québec Vert, qui a eu lieu du 20 au 22 novembre à Saint-Hyacinthe, les frères Beaudry ont placé la mention « nouveau producteur ». La Terre a constaté que cela a attiré l’attention de plusieurs clients potentiels. Leur présence a été d’autant plus remarquée que la relève est très rare en production horticole, souligne Nathalie Deschênes, directrice adjointe de Québec Vert, l’association des producteurs en horticulture ornementale. 

En fait, il est difficile de faire sa place parmi les gros joueurs déjà bien établis. David et Charles Beaudry comptent y arriver en offrant un produit haut de gamme avec un service exceptionnel.

On veut se spécialiser dans les cèdres de gros calibre, où il y a un peu moins de compétition. On veut aussi faire de l’épinette et de la pruche pour offrir toute une gamme de conifères ornementaux. On veut être capables de fournir les centres jardins et les entrepreneurs en paysagement qui vont venir chercher de grosses commandes. C’est ça, notre créneau.

Charles Beaudry

Face aux risques et à l’incertitude

Planter des arbres qui seront vendus sept ans plus tard comporte son lot de risques et d’incertitudes. Pour amoindrir l’incertitude, les deux frères ont monté leur plan d’affaires en se fixant des cibles réalistes basées sur de vrais chiffres, ceux de leur mentor, Alain Brodeur. 

L’autre élément qui leur donne confiance en l’avenir est leur capacité à développer leur clientèle, affirme David. « Beaucoup de monde nous a dit que nos arbres sont A1. Ce qu’on fait maintenant, c’est de se faire un nom avec le ­service », explique-t-il. Son frère renchérit : « Cet été, un entrepreneur nous a appelés. Il lui manquait des arbres. Mon frère et moi, on lui a loadé personnellement un camion le dimanche matin à 7 h, et maintenant, c’est un client régulier. » 

Les taux d’intérêt très faibles de la pandémie, dont ils ont bénéficié lors de l’achat de leur terre, les aident à respirer et rendent atteignable leur objectif de commercialiser 25 000 conifères annuellement. Ils travaillent leur réseau de contacts pour exporter une partie de cette production aux États-Unis. « On ne veut pas mettre tous nos œufs dans le même panier, mais le marché de la côte est américaine, à quatre ou cinq heures d’ici, est énorme, et avec le taux de change, on peut aller chercher des marges encore plus élevées. Alors, on l’explore », explique David.

Dans 10 ans, où se voient les deux producteurs? « Pour l’instant, on veut bien faire rouler ce qu’on possède. On pense que l’horticole est un secteur d’avenir, alors c’est certain qu’on veut foncer, souligne Charles. On a commencé assez jeunes. On a un bel horizon devant nous et les projets qui vont se présenter à nous, on va les saisir. On ne s’enlève aucune possibilité. »