Environnement 26 avril 2023

Ranch Clifton : changer les perceptions face à l’industrie bovine

Fier producteur de bœuf durable et acériculteur, Étienne Brodeur Bond ne s’en cache pas : il n’apprécie guère la mauvaise presse qui s’acharne sur l’industrie bovine. Une perception que le jeune propriétaire du Ranch Clifton, en Estrie, compte bien changer.

Étienne Brodeur Bond milite en faveur d’une production bovine « durable », soucieuse du bien-être animal et de l’environnement.

Petits détails, gros impact

Pour cet agriculteur de la relève, participer au projet Agriclimat offrait d’abord une belle occasion de s’instruire, mais aussi de mieux comprendre certaines facettes de son exploitation. « J’ai été impressionné par tous les éléments compilés dans mon bilan », reconnaît le producteur. Il regrette toutefois que les données actuelles ne tiennent pas compte des superficies forestières, qui constituent une partie importante de son territoire. « Quand on arrivera à comptabiliser cette donnée, certains producteurs pourraient voir leur bilan s’améliorer », soutient-il. L’exercice lui permet cependant d’envisager certains projets avec un enthousiasme nouveau. « Suite au bilan, on a déjà mis en place des pistes d’actions qui ont un effet immédiat sur l’émission des GES et je trouve ça vraiment l’fun! » Parmi les postes d’intervention ciblés pour sa ferme, une meilleure gestion du fumier lui semblait une solution facile à implanter. « Dans le bovin de boucherie, les vaches sont sur la paille sèche et j’accumulais beaucoup de fumier », relate le producteur. « J’ai appris que l’accumulation entraîne un manque d’oxygène. Ce n’est pas problématique en hiver, mais durant les périodes plus chaudes, cette absence d’oxygène libère plus de GES. En écurant le bâtiment plus rapidement, on évite de créer ces conditions d’anaérobie. On limite donc ses émissions sans avoir à investir davantage », résume-t-il. 

Un autre point à améliorer, soit la gestion des épandages du fumier, a mené le jeune entrepreneur à d’autres découvertes intéressantes. « On réalise que ce qu’on faisait avant était peut-être plus facile pour les agriculteurs, mais sans connaître nécessairement les effets sur l’environnement. Je me questionnais beaucoup là-dessus », reconnaît le producteur.

En plus de gérer différemment le fumier au bâtiment, il est possible d’intervenir sur la période d’épandage pour avoir un impact sur les gaz qui seront émis.

Étienne Brodeur Bond, Ranch Clifton

Par ailleurs, on peut aussi intervenir, dans une certaine mesure, sur l’alimentation des animaux. « Mon bétail est nourri à l’herbe à plus de 80 %, ce qui est un point en ma faveur. Les fourrages de meilleure qualité, moins fibreux, sont plus faciles à digérer pour les bovins. Ce sont sur ces petits détails-là qu’on peut jouer », allègue le producteur, qui cite aussi l’incidence du bien-être animal sur le méthane produit. « Si on tient compte de tous les facteurs qui englobent nos entreprises, on peut certainement améliorer notre bilan carbone », soutient l’entrepreneur.

Une mission d’éducation

Les jeunes agriculteurs sont-ils plus réceptifs à changer leurs méthodes que leurs prédécesseurs? Pour Étienne Brodeur Bond, il s’agit avant tout de rendre l’information disponible. Un principe qui s’applique aussi bien aux producteurs qu’à la population. « Par exemple, j’ai adhéré au programme VBP+ [Verified Beef Production] parce que pour moi, c’est important de produire un bœuf durable, soucieux de l’environnement, mais aussi de le promouvoir auprès des consommateurs, qui souvent ne savent pas que ça existe », affirme le producteur. Il voit dans le projet Agriclimat une occasion d’acquérir des connaissances nouvelles, mais aussi de partage entre les générations. « Je crois que l’aspect financier fait peur aux producteurs et c’est ce qu’il faut démystifier. Durant le projet, on se rend compte que les changements ne seront pas forcément associés à de gros coûts ou à des pertes de rendement », observe M. Brodeur Bond, qui croit que plus d’information et de publications finiront par venir à bout des préjugés tenaces. « Je pense qu’on va réussir à rallier l’ensemble des producteurs en leur démontrant que soigner l’environnement, c’est bon aussi pour le portefeuille. »

RANCH CLIFTON
Représenté par :

Étienne Brodeur Bond

Production :

Bovine (vache-veau et bouvillons en engraissement)

Conseillère :

Geneviève Pilon (Club Agroenvironnemental de l’Estrie)

Partenaire régional Agriclimat :

Julie Duquette, Fédération de l’UPA-Estrie


Qu’en dit la science ?

La gestion des déjections, en particulier la fréquence, les périodes et techniques de vidange des structures d’entreposage, ont une incidence importante sur les émissions de GES. Dans les systèmes où les fumiers sont accumulés dans le bâtiment, sortir le fumier plus fréquemment permet de réduire les émissions, notamment celles sous forme de méthane.