Alimentation 24 mai 2018

Quand les produits locaux deviennent la muse des chefs

À l’image des cinéastes qui convoitent le talent de grandes actrices, plusieurs chefs s’inspirent de l’œuvre des producteurs locaux pour rehausser leurs plats, au risque de payer un peu plus cher. Qu’est-ce qui pousse les restaurateurs à privilégier une relation directe avec les artisans du terroir? Et qu’est-ce qui les séduit?

Ce qui fait craquer le pizzaiolo Mirko d’Agata, c’est la fraîcheur et l’authenticité. Plutôt que d’importer la mozzarella di bufflonne d’Italie, le chef principal de la chaîne de pizzerias No 900 au Québec utilise le fromage des Élevages Buffalo Maciocia, de Saint-Charles-sur-Richelieu.
« C’est une fierté d’avoir un aliment traditionnellement associé à la pizza napolitaine, mais produit de façon locale et de très haute qualité », fait-il valoir.

Mirko d’Agata ne tient pas à se lancer dans « une guerre des prix » s’il a la garantie d’un service efficace et personnalisé avec son producteur local. Surtout lorsqu’une rupture de stock survient au beau milieu d’un week-end achalandé!

L’entreprise Buffalo Maciocia, qui approvisionne principalement les pizzerias avec son fromage, entretient une relation toute particulière avec cette chaîne. « On a développé le produit avec eux, car on était en plein dans la phase de recherche et développement à ce moment-là », raconte l’agronome et consultant Louis Hébert.

« Quand tu connais les producteurs et que tu aimes ce qu’ils font, tu continues à t’approvisionner auprès d’eux. » – Normand Laprise. Crédit photo : Gracieuseté de Hans Laurendeau / Shoot Studio
« Quand tu connais les producteurs et que tu aimes ce qu’ils font, tu continues à t’approvisionner auprès d’eux. » – Normand Laprise. Crédit photo : Gracieuseté de Hans Laurendeau / Shoot Studio

Constance

Pionnier de la gastronomie québécoise, le chef Normand Laprise, du restaurant Toqué!, s’estime choyé d’avoir accès à autant de sources d’approvisionnement directes. Depuis plus de 25 ans, l’homme d’affaires bâtit un réseau pour mettre en valeur les produits du terroir.

Obtenir le meilleur prix coûte que coûte n’est pas dans l’intérêt du chef, qui ne jure que par la qualité constante de ses marchandises. « On veut le meilleur. On a mis trop de temps et d’énergie pour tout perdre ça », affirme-t-il avec conviction.

Cette recherche de « constance » – mot d’ordre de M. Laprise – est aussi profitable pour les producteurs, qui sont assurés d’avoir des commandes régulières, souligne le chef. Depuis plus de 10 ans, La Sublime Asperge, de Saint-Aimé-de-Richelieu, fournit ses asperges les plus dodues au Toqué!

Depuis deux ans, Marie Beauchemin, de Canard du Village à Saint-Pie, se consacre au développement commercial auprès des restaurants. « J’ai quitté les distributeurs pour développer ce côté de la business. C’est beaucoup de route, beaucoup d’heures et d’énergie, mais il fallait faire ce choix-là », témoigne-t-elle.

Une décision qui lui a permis d’assurer des livraisons régulières de canards nourris aux grains dans plusieurs restaurants, dont le Rosélys du Reine Elizabeth ou encore le réputé Alo à Toronto.

La Sublime Asperge est reconnue par les grands chefs cuisiniers, dont certains spécialisés dans la cuisine végétarienne. « Il leur faut une qualité exceptionnelle », fait valoir la copropriétaire Nicole Saint-Jean, qui doit la tendreté et le petit côté sucré de ses asperges à la qualité de son sol. Rien à voir avec « l’asperge qui a trop voyagé », lance-t-elle.

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