Alimentation 12 avril 2018

Pesticides : ce qu’il faut savoir sur la nouvelle réglementation

Les impacts des pesticides sur la santé humaine et l’environnement soulèvent de grandes inquiétudes partout dans le monde. Si des pays comme la France sont sur le point d’interdire l’utilisation de certains pesticides dans la culture au champ, le Québec a quant à lui resserré de façon progressive l’usage de cinq ingrédients actifs depuis mars 2018. Alors que la dernière phase des nouvelles mesures entrait en vigueur le 1er avril 2019, La Terre présente les principaux changements qui concernent la culture de la pomme de terre.

La nouvelle réglementation avait touché jusqu’ici l’utilisation de l’atrazine (classes 1 à 3) et des semences enrobées des néonicotinoïdes clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame (classe 3 A) pour huit grandes cultures, dont le blé, le canola, le soya et le maïs-grain. À noter que les plantons de pomme de terre enrobés de ces trois néonics sont exclus de la nouvelle classe 3 A. Les producteurs qui souhaitent faire usage des pesticides et des semences enrobées visés pour la culture au champ doivent désormais obtenir la justification au préalable d’un agronome.

Depuis le 1er avril 2019, l’obligation de justification agronomique s’étend à l’utilisation du chlorpyrifos (classes 1 à 3) et de l’imidaclopride, du clothianidine et du thiaméthoxame (classes 1 à 3) dans l’application au sol ou l’épandage foliaire pour toutes les productions destinées à la culture au champ, y compris les pommes de terre. La justification, valide pour une période d’un an, doit être conservée par l’agriculteur pendant cinq ans. Les productions cultivées en bâtiment ou en serre sont exclues de cette obligation.

De plus, rappelons que les producteurs qui veulent acheter les pesticides visés par une justification agronomique doivent fournir au détaillant une prescription valide et signée par le même agronome.

Accompagnement professionnel

« L’application des pesticides visés par la justification agronomique doit être faite si c’est absolument nécessaire, explique en entrevue Janique Lemieux, agronome au ministère de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques (MELCC). Le but des nouvelles règles est de mettre en place un accompagnement professionnel auprès du producteur agricole pour favoriser des méthodes alternatives ou des pesticides moins nocifs. »

L’agronome, qui participait au colloque sur la pomme de terre organisé par le Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ) en novembre dernier, a rappelé aux producteurs l’obligation de tenir un registre de toute utilisation de pesticides à des fins agricoles (classes 1 à 3A). En vigueur depuis mars 2018, cette mesure concerne l’application en champ, en serre ou en bâtiment et s’étend également aux semences enrobées de néonics et aux biopesticides.

De plus, l’agriculteur doit tenir le registre même si les travaux d’application de pesticides se réalisent à forfait ou si la parcelle est en location, ajoute Janique Lemieux. « Le registre est un outil nécessaire pour faire avec précision l’analyse de l’utilisation des pesticides et de l’efficacité des interventions. Il permet aussi de faire de meilleurs suivis avec l’agronome. »

Pour aider les agriculteurs à s’adapter aux nouvelles mesures réglementaires, le MAPAQ a alloué une somme supplémentaire de 14 M$ pour la période 2017-2022. Ce montant servira à bonifier l’aide financière aux services-conseils, à dédommager les agriculteurs et à mener différentes stratégies en faveur de solutions de rechange aux pesticides.

Environnement et santé humaine

Ce resserrement des règles entourant l’utilisation des pesticides en milieu agricole répond à une volonté du gouvernement québécois de mieux
protéger la santé des populations, des agriculteurs, des pollinisateurs et de l’environnement.

Un rapport du MELCC, basé sur des échantillons prélevés dans plusieurs rivières près des zones agricoles pour les années 2015 à 2017, confirmait d’ailleurs une « hausse significative » de la présence de pesticides comme le glyphosate et les néonicotinoïdes dans l’eau, et révélait de fréquents dépassements des critères établis pour la protection de la vie aquatique.

En 2018, Santé Canada proposait d’abandonner tous les usages extérieurs de la clothianidine, le thiaméthoxame et la plupart des usages extérieurs de l’imidaclopride dans un horizon de trois à cinq ans. 

En savoir plus :

http://mddelcc.gouv.qc.ca/pesticides/permis/modif-reglements2017/index.htm

La liste des noms commerciaux des pesticides visés par une justification agronomique au Québec :

http://www.environnement.gouv.qc.ca/pesticides/permis/modif-reglements2017/Liste_justification_agronomique.pdf

Pour de plus amples renseignements sur les aides financières du MAPAQ, on contacte l’une des différentes Directions régionales :

https://www.mapaq.gouv.qc.ca/fr/coordonnees/Pages/Liste-des-coordonnees.aspx

David Riendeau, journaliste