Alimentation 26 février 2024

Les boulangers veulent aider les producteurs de blé québécois

BROSSARD – Un agriculteur de la Montérégie a surpris un auditoire de boulangers et de meuniers, le 15 février, en expliquant les difficultés et la précarité de la culture de blé, lui faisant ainsi réaliser qu’il fallait donner un coup de pouce aux producteurs. 

« Qu’est-ce que Première Moisson peut faire et qu’est-ce que l’industrie de la boulangerie artisanale peut faire? Je ne le sais pas encore, mais de comprendre ce qu’un agriculteur vit comme problème, je me dis qu’il faut changer des choses », a par la suite exprimé Éric Côté, vice-président et directeur général du Groupe Première Moisson, une enceinte de boulangeries qui comptera bientôt 26 succursales. Ce dernier produit de grands volumes de pains, et l’un des critères qui importent à ses clients demeure la provenance locale des grains servant à les produire. « J’ai du volume et j’ai besoin de farine du Québec. Mais quand tu regardes la présentation du producteur, et que tu vois les courbes de rendement du maïs et du soya, qui montent depuis des années, et celle du blé qui stagne, et que le producteur explique qu’il n’y a pas d’innovation dans le blé, pas de recherche en génétique, j’ai pris des notes et je me dis qu’il faut comprendre ce qui se passe. Il faut les aider, faire pression sur les instances qui régularisent la recherche. En fait, je suis ouvert à tout ce qui peut être gagnant-gagnant avec eux », a souligné M. Côté, en marge du premier rendez-vous de tous les maillons de la chaîne d’approvisionnement des boulangeries, organisé à Brossard par Boulangerie Québec et Concertation Grains Québec. 

Le producteur en question était François Jodoin, de Varennes, en Montérégie. Il a fait part de la rentabilité « faible ou inexistante, même à long terme », de la culture de blé sur ses terres et de sa surprise de voir sa récolte déclassée. « Quand une van de blé part de la ferme [vers l’acheteur], on se demande sur quoi on va se faire couper : le taux de protéine, l’indice de chute, la fusariose? Il y a toujours quelque chose. Et en Montérégie, le potentiel du blé se détériorera avec la météo de plus en plus excessive. C’est assez démotivant », a-t-il insisté devant un auditoire captif. 

Mauvais moment

Selon Éric Côté, cette démotivation des producteurs arrive à un bien mauvais moment, puisque le nombre de boulangeries artisanales est en pleine augmentation ces temps-ci, selon lui, autant chez Première Moisson que chez ses compétiteurs comme L’amour du pain, Au pain doré et Les moulins La Fayette.

Rudy Laixhay affirme qu’il faut améliorer la rentabilité du blé pour le producteur québécois, que ce soit par une rétribution venant directement du consommateur ou un meilleur soutien gouvernemental. Photo : Martin Ménard/TCN

Rudy Laixhay, gestionnaire de la meunerie Pierre du Moulin dans Charlevoix, était aussi sur place et confirme une recrudescence des boulangeries en région. Le chiffre d’affaires de sa meunerie connaît une croissance de près de 100 % par année. Celui qui travaille avec des producteurs uniquement du Québec milite pour une augmentation des volumes de blé produits localement. 

Programme éthique proposé

Comme solution, il préconise la mise sur pied d’un programme éthique, qui s’appuierait sur des redevances financières vers le producteur, par exemple sur chaque pain vendu, de même qu’un meilleur soutien gouvernemental pour la culture du blé qui, à ses yeux, représente une production plus diversifiée et plus environnementale que le maïs et le soya transgéniques.

Un hectare de blé donne environ…

3,8 tonnes de blé,

soit 2 860 kg de farine;

ou 6 865 pains tranchés;

ou 3 400 pains baguettes.