Actualités 26 novembre 2019

Reconnecter les forêts et les champs

La perte de forêts inquiète plusieurs chercheurs de l’Université McGill. Les milieux forestiers sont notamment très importants pour les terres agricoles, car ils abritent des insectes pollinisateurs, mais aussi des prédateurs comme la coccinelle, qui peuvent contrôler les insectes ravageurs des cultures.

Les arbres forment par ailleurs une barrière naturelle qui protège les cours d’eau environnants du lessivage des champs. Pourtant, l’étalement urbain et l’urbanisation morcellent de plus en plus les forêts et les milieux naturels. La faune se retrouve alors isolée dans des fragments de boisés, parfois loin des champs agricoles.

« Il faut reconnecter le paysage en créant des corridors écologiques ou passages naturels qui permettront notamment à la faune de se déplacer d’un milieu à l’autre », mentionne Elena Bennett, professeure au Département des sciences des ressources naturelles de l’Université McGill.

L’écologiste et ses collègues Andrew Gonzalez et Martin Lechowicz, du Département de biologie, ont développé un outil interactif pour mieux planifier l’aménagement du territoire. Ils se sont entre autres servis de la Montérégie comme d’un « laboratoire » pour développer un modèle informatique qui inclut divers paramètres comme la biodiversité, le stockage de carbone, le recyclage des nutriments, la production agricole et forestière, etc.

« La Montérégie, située au sud-est de l’île de Montréal, subit les pressions de l’étalement urbain et des bouleversements climatiques, précise Elena Bennett. Nous avons analysé une douzaine de “services” que les écosystèmes procurent à la population, dont la nourriture, la pollinisation, la chasse et la production de sirop d’érable, et nous avons évalué la synergie entre les diverses utilisations du milieu naturel, comme l’agriculture et les loisirs. »

Gestion du territoire

L’outil, toujours en cours de développement, permet d’obtenir des réponses à des questions complexes de gestion du territoire, telles que le niveau de production agricole que peut procurer un milieu donné, la quantité de carbone stocké dans une forêt, les mécanismes de régulation des sécheresses et des inondations dans les différentes parties du territoire ou encore les impacts de la construction de routes sur les écosystèmes.

La chercheuse et son équipe pensent que leur modèle de gestion de l’aménagement sera très pertinent pour les agriculteurs. « Il ne faut pas juste regarder le potentiel d’un champ en termes de production; on doit aussi évaluer d’autres paramètres comme sa capacité à emprisonner le carbone, par exemple. » Les producteurs pourront éventuellement se baser sur cet outil pour évaluer les effets de certaines interventions sur les terres agricoles, comme couper un boisé en bordure de leurs cultures ou aménager une route.

La Communauté métropolitaine de Montréal pourra aussi s’en servir pour planifier sa « ceinture verte » qui vise à protéger 1,7 million d’hectares d’écosystèmes, constitués à 48 % de terres agricoles.

Urbanisme vert

Montréal emboîte le pas à d’autres grandes villes comme Toronto, San Francisco ou São Paulo, qui se sont dotées d’une « ceinture verte » avec l’objectif de contenir l’étalement urbain. L’initiative vise par ailleurs à promouvoir un développement urbain harmonieux, qui respecte les milieux naturels et agricoles en les reliant par des corridors écologiques.

Nathalie Kinnard, agence Science Presse