Apprendre à vivre avec un diagnostic de cancer

Gabriel a 25 ans. Producteur laitier à la ferme familiale avec son père, il avait comme ambition de reprendre l’entreprise. Les démarches pour un transfert étaient enclenchées. Il était loin de se douter qu’un problème de santé chamboulerait ses plans. C’est pourtant ce qui est arrivé lorsqu’un verdict de cancer est tombé. Comment peut-on continuer d’être positif après une telle annonce?

« J’étais tout le temps fatigué, plus que d’habitude », se remémore Gabriel. « Je suis allé voir mon médecin parce que je m’endormais partout; ça n’avait pas d’allure », poursuit-il. Puis, la nouvelle qu’il redoutait l’a frappé en plein cœur : masse cancéreuse. « Ç’a été un gros choc! Je ne pouvais pas croire que ça m’arrivait à mon âge. J’avais l’avenir devant moi, des projets, une terre et des animaux », dit-il, le -trémolo dans la voix. Le jeune homme s’est alors engagé dans l’imposante machine du système de santé. « Au début, la chimiothérapie et la radiothérapie, ça te rentre dans le corps. Le lendemain des traitements, je n’avais pas le choix de dormir un peu plus tard le matin. » Heureusement pour Gabriel, son père a été compréhensif et a mis les bouchées doubles à l’étable pour lui permettre de se rétablir. « Mon père a eu peur de me perdre, même s’il ne me le disait pas. Je lui répétais d’aller en parler de son côté, de consulter pour ne pas garder sa peine à l’intérieur de lui », raconte le jeune producteur.

Gabriel, lui, a eu besoin d’exprimer ses émotions auprès d’une personne neutre. « Je ne pouvais pas tout dire à mes amis et à ma famille. C’était difficile pour eux de me voir comme ça. Le fait de me confier à une travailleuse de rang m’a donné le droit d’avoir de la peine. Elle m’a surtout rappelé que je méritais tout l’amour que l’on me démontrait. Ça m’a fait du bien », précise-t-il. Pour lui, le simple fait d’accepter que ses amis l’aident à faire le train ou même à aller à ses rendez-vous à l’hôpital lui demandait un grand effort. « Quand on est producteur, on apprend souvent à s’arranger seul. Là, je ne pouvais plus tout faire moi-même », raconte-t-il.

Gabriel a dû commencer à déléguer et à prioriser. Par exemple, l’érablière sera reprise par des membres de sa famille. Il a décidé de ne plus s’en occuper. « Je vais leur montrer pendant un an comment ça marche et après ça, je les laisserai faire, car c’est trop d’ouvrage pour moi », ajoute-t-il. À présent, le jeune agriculteur est bien conscient que sa santé doit passer avant tout. Il a appris à se choisir et à accepter le fait qu’il ne pouvait pas tout faire seul. Il a privilégié son bien-être en s’offrant des petits moments de plaisir, comme faire l’acquisition du « quatre-roues » de ses rêves. « J’ai décidé de l’acheter plus tôt que prévu, probablement parce que j’ai senti une urgence de vivre maintenant », dit-il en souriant.

L’histoire de Gabriel ramène à la fragilité de la vie. Personne n’a de contrôle absolu sur la santé, mais lorsque le corps envoie un message, il est bon de prendre le temps de l’écouter. Face à cette épreuve, Gabriel a choisi de se battre et de foncer. Il s’encourage à présent, car son médecin lui a annoncé la disparition de sa tumeur. Tous n’ont pas cette chance, et il en est bien conscient.