Élevage 1 avril 2019

Nouvelle réglementation pour un usage judicieux des antibiotiques

La résistance aux antibiotiques est un phénomène naturel connu depuis longtemps, mais leur mauvais usage chez l’humain et les animaux accélère le développement de cette dernière. Une vaste étude, menée par des chercheurs de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, est en cours dans une centaine de fermes laitières du Québec pour documenter l’utilisation des antibiotiques au sein des troupeaux et observer une possible résistance qui s’y développerait. Cette étape importante permettra de brosser un portrait juste de la situation et ainsi de formuler les recommandations appropriées.

Classés en quatre catégories d’importance pour les médecins, les antibiotiques à usage vétérinaire de catégorie 1 regroupent ceux de très haute importance pour la médecine humaine. Ils sont considérés comme essentiels pour le traitement de maladies graves puisqu’il existe peu ou pas de produits de remplacement.
Au Québec, le nouveau règlement du ministère de l’Agriculture « vise à interdire l’utilisation à titre préventif et à délimiter l’emploi à titre curatif des antibiotiques de catégorie 1 ». Ces normes servent à protéger leur efficacité chez l’humain et les animaux afin de réduire les risques d’échec de traitement et de mortalité. La santé animale et humaine est interreliée, et nous devons travailler ensemble pour la préserver.

Certains produits injectables disponibles pour les vaches laitières, comme l’Excenel, l’Excede, l’Eficur, le Cevaxel et le Ceftiocyl, contiennent un antibiotique de catégorie 1, le ceftiofur. L’administration d’un traitement qui ne respecte pas les directives sur l’étiquette favorise le développement de résistance des bactéries présentes dans le troupeau.

Or, on trouve également ce type d’antibiotiques dans deux autres produits injectables : le Baytril et le A180. Ceux-ci sont prescrits pour le traitement des maladies respiratoires chez les jeunes animaux, bien qu’il existe d’autres options thérapeutiques efficaces. Deux produits intramammaires, le Spectramast LC et le Spectramast DC, contiennent aussi du ceftiofur. Dorénavant, l’utilisation de cet antibiotique en prévention au tarissement sera simplement interdite. Pour traiter la mammite clinique durant la lactation, encore une fois, d’autres solutions sont possibles.

Enfin, un tube intramammaire très populaire, le Special Formula 17900-Forte, contient également un antibiotique de très haute importance, qu’on appelle la polymyxine B. Saviez-vous que le « 17900 » ne compte pas moins de quatre antibiotiques et de l’hydrocortisone, un anti-inflammatoire? Cette formulation est appréciée parce que l’inflammation du quartier diminue rapidement. Cet effet est attribuable à l’anti-inflammatoire plutôt qu’à l’efficacité des antibiotiques. Une autre option pour traiter une vache dont l’un des quartiers est enflé – sans autre atteinte à son état général – serait d’utiliser un anti-inflammatoire par voie intramusculaire ou intraveineuse. De plus, il est démontré qu’une mammite clinique sur deux ne nécessite pas de traitement antibiotique puisque les bactéries sont éliminées naturellement par le système immunitaire de la vache. 

Nouvelles règles

  • L’administration d’un antibiotique de catégorie 1 à des fins curatives est réservée pour traiter une maladie sur laquelle un médicament d’une autre catégorie d’antibiotiques n’a eu aucun effet;
  • L’administration d’un antibiotique de catégorie 1 à des fins préventives est interdite.

DRE HÉLÈNE LARDÉ, médecin vétérinaire, Faculté de médecine vétérinaire de l’Université́ de Montréal
DR JONATHAN MASSÉ, médecin vétérinaire, Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal
DR DAVID FRANCOZ, médecin vétérinaire, Professeur titulaire et Vice-doyen au personnel enseignant de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal
DR SIMON DUFOUR, médecin vétérinaire, Professeur agrégé de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université́ de Montréal
DR JEAN-PHILIPPE ROY, médecin vétérinaire, Professeur titulaire de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal