Vie rurale 7 février 2019

Le jour où notre monde s’est effondré

Le dimanche 17 juillet 2016, au petit matin, toute ma famille dort paisiblement. À 4 h 30, le téléphone sonne. Mon conjoint répond. Il n’a pas le même ton que d’habitude. Il raccroche en panique et me crie : « Le feu est pris à l’étable! » 

Tout se bouscule dans ma tête. C’est assez vague quand on y pense. Qu’est-ce qui brûle? Le feu est de quelle ampleur? J’appelle ma mère pour lui dire de venir rapidement à la maison pour garder les enfants. J’enfile les premiers vêtements que je trouve et je saute dans ma voiture. Sur la route, je lève les yeux et je vois cet épais nuage de fumée noire et rouge dans le ciel devant moi.

À mon arrivée, j’assiste à une scène d’horreur : c’est un brasier généralisé! Il n’y a plus rien à faire pour les animaux. Impuissants, nous regardons ce paysage de désolation. Les cadavres de nos 165 vaches gisent à travers les décombres. Seulement 16 bêtes ont réussi à sortir, et sur ce nombre, 8 ont survécu. 

En milieu d’après-midi, je finis par me rappeler que j’ai des enfants et qu’ils ne sont au courant de rien. Je suis anéantie et épuisée. Comment vais-je réussir à leur annoncer cette terrible nouvelle? Ils sont si petits! Comment vont-ils arriver à comprendre? Comment vais-je pouvoir réussir à les consoler, si je suis moi-même inconsolable? Il me faut trouver les bons mots pour leur dire. 

Je m’assois avec eux et je leur parle tout doucement. Je leur dis que papa va bien. Puis, je leur explique qu’il est arrivé quelque chose de triste à nos vaches. Pendant qu’elles dormaient, un feu a commencé à brûler dans la paille, ce qui a causé un énorme nuage de fumée noire qui a endormi les vaches pour toujours. Elles sont parties rejoindre les étoiles dans le ciel. Nous sommes chanceux, car certaines d’entre elles ne dormaient pas et sont sorties dehors. Je leur explique ensuite que la ferme a complètement brûlé. Nous pleurons ensemble, collés les uns contre les autres, mais tout se passe sereinement.

Le lendemain matin, nous emmenons les enfants voir nos survivantes. C’est un moment rempli de bonheur et d’amour. En voyant les étoiles dans les yeux de mes enfants, je comprends que ce que nous avons encore est le plus important : notre famille. Une lueur d’espoir brille à l’horizon! Nous décidons alors de prendre un jour à la fois. La vie ne sera plus jamais comme avant, mais notre avenir nous appartient. Nous allons vivre notre deuil puis nous retrousser les manches et rebâtir notre rêve, notre vie!

L’histoire intégrale est publiée à Agrimom.ca.  

Christine Aubin, Agrimom