À coeur ouvert 21 mars 2018

Pas toujours simple, l’intégration de « l’intrus » à la ferme

Le dictionnaire Larousse décrit ainsi un intrus : « Qui s’est introduit dans un groupe, chez quelqu’un, sans avoir qualité pour y être admis, sans y être invité. Elle considère son gendre comme un intrus. »

Catherine*, dont nous avons reçu le témoignage cette semaine, utilise ce terme « d’intrus » pour exprimer la façon dont certaines brus ou certains gendres se sentent lorsqu’ils essaient de s’intégrer à une famille agricole. 

Lorsqu’une famille est très soudée, cela comporte de grands avantages pour ses membres, notamment en matière de soutien et d’entraide. Par contre, comme nous l’écrit Catherine, « […] il peut être difficile, même intimidant, pour une personne de l’extérieur de s’intégrer à un clan tissé aussi serré. C’est pourtant ce que vivent plusieurs brus et gendres lorsqu’ils ou elles font le choix de suivre Dulcinée ou Adonis… » 

coeur_ouvertDans certains cas, l’intégration se passe très bien. En revanche, dans d’autres, la bru ou le gendre ont l’impression d’être moins importants que les autres membres de la belle-famille. Certains en arrivent même à la conclusion que peu importe ce qu’ils feront, ils demeureront un intrus et une menace pour l’entreprise familiale. Ils auront donc toujours à faire leurs preuves. 

Malheureusement, certaines brus ou certains gendres sont victimes des préjugés ou des stéréotypes voulant qu’ils soient tous des profiteurs désirant mettre la main sur un patrimoine familial durement acquis. Bien que plusieurs désirent s’impliquer à la ferme et aient les compétences nécessaires pour le faire, la hantise d’une perte du patrimoine familial en cas de divorce peut constituer un obstacle à leur intégration. On peut se demander si on leur accorde toujours une vraie chance de s’intégrer.

Le manque d’intimité et l’impression de ne pas se sentir chez soi s’ajoutent aux doléances de Catherine. Ce n’est pas tant la proximité que l’envahissement de la belle-famille qui dérange : « Il est difficile pour l’intrus de faire respecter SON nid familial. Cet intrus, rappelons-le, a lui-même quitté ses proches. Il est alors incompréhensible, même inconcevable pour lui que le conjoint ne soit pas en mesure d’assurer une PETITE distance ou, à tout le moins, une forme d’intimité à sa famille. La présence continuelle de la belle-famille dans sa maison, dans la gestion de sa famille, dans les décisions importantes concernant les enfants, et même dans son propre couple peut devenir très lourde à supporter pour l’intrus. »

Règles de base

Le succès de la cohabitation repose sur certaines règles de base, dont celle de respecter les frontières et l’intimité de chaque famille. En outre, on dit que le temps arrange les choses, mais pas toujours. Dans ce cas-ci, l’accumulation de frustrations a conduit à l’éclatement du couple. 

Lorsqu’on entreprend une vie à deux, ça demande de petits ajustements de la part de chaque conjoint. En agriculture, ceux-ci peuvent être plus importants du fait de la cohabitation et de la coexploitation de deux ou plusieurs familles avec toutes leurs différences… Travaillez sur des « accommodements raisonnables » de façon à ce que chaque partie ne se sente pas lésée. Ajustez-vous au fur et à mesure; cela évitera les trop-pleins et l’éclatement. On ne prend jamais trop de temps pour exprimer les sentiments, les attentes respectives sur les rôles dans la famille et dans l’entreprise. 

Apprendre à partager des espaces communs, une entreprise, une famille, dans le respect et pour le mieux-être de chacun de ses membres, est un art qui se cultive tous les jours.  

* Prénom fictif pour préserver son identité.