Politique 20 mars 2018

Les critères pour la prescription contestés

Pour prescrire des néonicotinoïdes, les agronomes devront utiliser un modèle décisionnel dont les bases sont contestées par les Producteurs de grains du Québec (PGQ), a appris La Terre.

Les nouvelles règles sur la prescription obligatoire s’appliqueront à partir de la saison 2019 et deux critères décisionnels ressortent pour le maïs : il faudra qu’une proportion de 5 % de plantules endommagés soit constatée au champ et que l’on observe plus de trois vers fil-de-fer par piège-appât. La recherche effectuée par le Centre de recherche sur les grains (CÉROM) est à la base du modèle baptisé VFF QC et accessible gratuitement en ligne. Ces seuils permettent « d’éviter toute perte de rendement », d’après les études consultées par La Terre. Pour le soya, les chercheurs du CÉROM ont noté qu’il n’y avait pas de gain économique, mais aussi, une grande variabilité d’une année à l’autre. Par conséquent, ils indiquent que les deux années d’études ne sont probablement pas suffisantes pour conclure sur l’utilité ou non des néonics. Ils recommandaient de poursuivre la recherche, ce qui n’a pas été fait.

Or, le président des PGQ, Christian Overbeek, estime qu’il faut poursuivre les études avant de conclure sur l’inefficacité des néonics avancée par les travaux du CÉROM.

Selon lui, « des centaines de producteurs » ont mené des essais comparatifs pendant trois ans sur des superficies plus grandes que les parcelles de recherche et ont constaté en « très grande majorité » des pertes de rendement sur les superficies sans traitement de semences. Ces pertes oscillaient entre 1 % et 13 % à la récolte. Une minorité n’a tout de même pas observé d’écart ni même de perte de rendement avec le traitement. « Il y a quelque chose qui ne marche pas à 100 % avec l’outil de décision du CÉROM », explique Christian Overbeek. Sur les terres de celui-ci, on n’a pas capturé de vers fil-de-fer par des pièges et pourtant, on a quand même constaté des pertes de rendement en l’absence des néonics.

Ces essais d’agriculteurs auraient été menés avec l’aide d’agronomes pour minimiser le nombre de variables autres que la présence ou l’absence de pesticides. Il n’y a toutefois pas eu de compilation officielle.

Pas de blocage des études

Christian Overbeek tient par ailleurs à préciser que ni lui ni le conseil d’administration n’ont retardé la publication des études du CÉROM qui avaient déjà fait l’objet d’une diffusion par le biais de conférences et de réunions. Il estime que c’est le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec qui était responsable de la publication officielle. Le ministre Laurent Lessard a attribué le délai de publication à « une erreur ». Des sources anonymes, qui sont d’anciens employés du CÉROM, estiment de leur côté que le conseil d’administration a eu un rôle dans ce retard de parution de rapports sur les néonicotinoïdes.