Alcools 31 juillet 2022

Des bleuets, du vin et une famille heureuse

VAL-ALAIN La famille Payeur-Boissonneault ne se doutait pas du tout de ce qui l’attendait quand elle s’est lancée, il y a 10 ans, dans la production de bleuets à Val-Alain, dans Chaudière-Appalaches. Depuis, le projet de départ est devenu une tout autre aventure, où chacun a un rôle à jouer.

Fiche technique

Nom de la ferme :
La Vallée Bleue Distillerie

Spécialités :
Production de bleuets
et distillerie artisanale

Année de fondation :
2012

Noms des propriétaires :
Mysa Payeur et Rock Boissonneault

Nombre de générations :
1

Superficie en culture :
25 000 plants de bleuets,
10 000 plants de cassis et
une érablière

Cheptel :
20 bœufs, 20 cochons

Rock Boissonneault, ancien travailleur du secteur de la construction, et sa conjointe Mysa Payeur, autrefois électricienne industrielle dans l’armée, ont décidé il y a une dizaine d’années de changer de vie en exploitant des terres qui leur appartenaient à Val-Alain, dans Chaudière-Appalaches. En trouvant conseil auprès d’autres producteurs, le couple s’est donc lancé dans la culture de bleuets. L’objectif était d’abord de vendre leur récolte en gros pour les grandes chaînes.

Depuis, leur plan s’est adapté à une réalité bien différente de ce qu’ils avaient imaginé au départ. « La vente en gros, ça ne nous permettait pas d’arriver parce que notre production était trop petite. En plus, on a dû faire face à deux saisons de gel, où on a presque tout perdu. On s’est donc tournés vers la transformation pour tirer de meilleurs profits de nos récoltes. Mais les tartes aux bleuets, ce n’était pas pour moi », souligne à la blague Mme Payeur. Le couple a plutôt embauché des œnologues pour démarrer une distillerie sur de bonnes bases, et y est ensuite allé « d’essais et d’erreurs » pour atteindre la qualité recherchée pour ses vins et spiritueux, raconte la productrice, qui a également suivi une formation dans le domaine.  En parallèle, ils ont ouvert une partie de leurs champs à l’autocueillette, qui profite de l’achalandage en provenance d’un camping, situé non loin de leur site, et rénové leur bâtiment pour l’accueil des visiteurs et la vente de leurs produits.

Un food truck et des cochons

À travers les années, d’autres projets se sont aussi greffés à l’entreprise La Vallée Bleue Distillerie, dont quelques bœufs et cochons élevés en forêt, qui permettent d’ajouter « un petit plus », estime Mme Payeur. Car la viande issue de cette petite production, et vendue à leur boutique, ne reste jamais longtemps sur les tablettes, dit-elle.

La famille reconstituée, qui compte un total de cinq enfants, laisse aussi beaucoup de place aux goûts de chacun pour orienter ses décisions. Par exemple, les deux filles Laya, 23 ans, et Maël, 13 ans, ont décidé de gérer leur propre food truck cet été. Elles ont concocté un menu à partir de la viande produite à la ferme et ouvrent leur restaurant mobile, qu’elles ont nommé le LMB Ranch, aux clients de la bleuetière pendant la saison.

Éli, 15 ans, a la responsabilité des cochons aux pâturages.  « Il nous a demandé s’il pouvait s’acheter quelques cochons, et on l’a aidé à planifier et à réaliser son projet », explique la mère, qui se réjouit de voir que plusieurs des enfants montrent un intérêt pour prendre la relève de l’entreprise.

La Vallée Bleue Distillerie compte actuellement 20 hectares en culture de bleuets sur une possibilité de 80 hectares. Photo : Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie
La Vallée Bleue Distillerie compte actuellement 20 hectares en culture de bleuets sur une possibilité de 80 hectares. Photo : Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie

250 000 plants de bleuets en deux semaines

Avec le recul que leur permettent maintenant leurs dix années d’expérience, Mme Payeur et M. Boissonneault ne croient pas qu’ils se seraient lancés dans cette aventure s’ils avaient su tout le travail que cela impliquait. « C’est sept jours sur sept. Au début, je m’occupais un peu de la production avec Rock, mais depuis qu’on a démarré la distillerie, je dois me consacrer entièrement à la gestion de la paperasse, aux demandes de permis…  Il y en a ­tellement! » s’étonne l’agricultrice. Par ailleurs, ils se félicitent de certaines décisions prises au moment de leur démarrage, qui leur ont permis de tirer leur épingle du jeu malgré la petite taille de l’entreprise. Par exemple, l’achat d’une planteuse à tomates, qui a été reconvertie par Rock en ­planteuse de plants de bleuets, leur a permis de mettre en terre 35 000 plants en deux ans, ce qui n’aurait pu être possible sans embaucher davantage de ­main-d’œuvre, signale sa conjointe. 

Les propriétaires de La Vallée Bleue Distillerie produisent à ce jour deux vins, trois liqueurs et neuf spiritueux. Photo : Patricia Blackburn/TCN
Les propriétaires de La Vallée Bleue Distillerie produisent à ce jour deux vins, trois liqueurs et neuf spiritueux. Photo : Patricia Blackburn/TCN

Équipement techno

L’achat d’une récolteuse mécanique à bleuets, bien que dispendieux, a permis à la jeune entreprise de sauver énormément en temps et en coût de ­main-d’œuvre, ce qui à long terme s’est avéré rentable. « Ici, au Québec, le prix de la récolte de bleuets est d’environ 1 $ la livre quand on doit recourir à des cueilleurs. Avec la récolteuse, c’est environ 0,20 $ la livre », illustre Mysa Payeur. La machine a été acquise usagée d’un producteur de Colombie-Britannique, mais a dû être légèrement modifiée pour convenir à des plants de bleuets plus petits que ceux pour lesquels elle était conçue à l’origine.

Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie
Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie

Le bon coup de l’entreprise

Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie
Gracieuseté de la Vallée Bleue Distillerie

En février 2022, La Vallée Bleue Distillerie s’est distinguée à la compétition Distillateurs artisanaux Canada, qui s’est tenue en Colombie-Britannique, en obtenant entre autres une médaille d’or pour sa liqueur de canneberge Atokmix et pour sa liqueur de bleuet Blümix. L’année précédente, c’était sa liqueur de cassis Cassimix ainsi que son brandy qui s’étaient hissés au sommet de leur catégorie. Ces reconnaissances enchantent les producteurs Mysa Payeur et Rock Boissonneault puisqu’ils estiment être encore aux balbutiements de leur expérience de distillateurs.

« Présentement, on ne peut pas encore faire vieillir très longtemps ce qu’on produit, car on a besoin de tout vendre pour être rentable. Mais à plus long terme, on espère pouvoir en raffiner certains qui gagneraient à rester un peu plus longtemps dans les barils », indique M. Boissonneault. L’entreprise produit au total deux vins, trois liqueurs et neuf spiritueux vendus en boutique, en ligne, en épiceries et dans certains marchés spécialisés. Les producteurs ont aussi dans leurs cartons un nouveau produit à base d’érable. 

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