Vie rurale 22 juin 2021

Quel avenir pour le site de Semex à Sainte-Madeleine?

Quelques mois après l’annonce du transfert vers l’Ontario des taureaux de Sainte-Madeleine, le vice-président de l’Alliance Semex, Jean-François Morin, fait le point, lors d’une entrevue avec La Terre, sur cette décision qui a déçu plusieurs producteurs.

Jean François Morin
Jean François Morin

Son organisation, réitère-t-il, souhaite que les installations de la Montérégie qui seront laissées vacantes en août conservent une vocation agricole. « On a été approchés par des entreprises intéressées à acheter, mais on n’a pas retenu les offres. On ne souhaite pas vendre », a indiqué M. Morin. Sans confirmer ce qu’il adviendra du site de Sainte-Madeleine, ce dernier souligne que le laboratoire d’embryologie Boviteq de Saint-Hyacinthe, une division de Semex, « évolue vite ».

« On va possiblement avoir besoin de plus d’espace pour plus de femelles », s’est-il contenté de dire, sans donner plus de détails. En février, le directeur général de Semex, Paul Larmer, avait indiqué à La Terre que l’option d’utiliser les installations de Sainte-Madeleine pour de la recherche était envisagée. Il avait aussi insisté sur sa volonté que l’espace demeure un « symbole d’agriculture au Québec ».

Un déménagement émotif

« C’est comme si on nous enlevait encore une fois un de nos fleurons », se désole Christian Castonguay, producteur laitier à la retraite. Le résidant de Mirabel se souvient très bien de l’époque où le site de production de semence de Sainte-Madeleine appartenait au Centre d’insémination artificielle du Québec (CIAQ). Ce site, à ses yeux, est la propriété des producteurs, au même titre que le CIAQ. « C’est très émotif pour les plus vieux éleveurs, le déménagement des taureaux. On s’est tellement battus pour ça. On a tellement été souvent écrasés par l’Ontario », témoigne-t-il, nostalgique. « C’est la fin d’une époque ».

Sylvain Martel, producteur laitier à Saint-Prime, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, comprend quant à lui la volonté de Semex de rentabiliser ses activités, mais déplore que « ça se fasse aux dépens des producteurs ». « Les plus jeunes générations n’ont pas le même sentiment d’appartenance au CIAQ que nous.

C’est un acquis pour eux. Nous, on a vu ça se construire », souligne-t-il. Jean-François Morin, qui porte également le chapeau de président du conseil d’administration du CIAQ, comprend la déception des producteurs. « Moi aussi, je suis déçu », soutient-il, rappelant néanmoins que la décision rendue était inévitable pour optimiser les opérations de Semex. « Il ne reste que 200 taureaux à Sainte-Madeleine. Il y en a déjà eu quatre fois plus. Quand on veut grossir, on ne peut pas garder des boîtes moins efficaces. On doit sauver des coûts », indique M. Morin.


Le CIAQ en mode restructuration

Après avoir connu des déficits opérationnels, le Centre d’insémination artificielle du Québec (CIAQ) a redressé ses finances en 2020, assure le président Jean-François Morin. La COVID-19 a forcé l’entreprise à revoir certaines de ses opérations, notamment en ce qui a trait au service d’insémination artificielle.

« La COVID-19 nous a poussés à revoir notre façon de travailler et à restructurer. Il y a des choses qu’on a mis en place qui vont continuer, parce que ça nous permet de sauver des coûts, sans nuire à la qualité du service aux producteurs », indique-t-il.

Il explique par exemple que l’entreprise effectue dorénavant une tournée par jour au lieu de deux dans les fermes

du Québec pour l’insémination artificielle. « Les services d’insémination, c’est notre force, mais c’est aussi une faiblesse », reconnaît-il, affirmant que cette portion des activités du CIAQ implique d’importants coûts opérationnels. En plus, la compétition pour la vente de semence, soutient-il, est de plus en plus féroce. « Il faut dire qu’on maintient quand même une part de marché de 66 %. On est la bête à battre », affirme M. Morin.

Le président souligne que dans son plan stratégique 2020-2025, le CIAQ veut continuer de trouver des façons d’optimiser ses activités. « Une chose est sûre, c’est que le CIAQ restera la propriété des producteurs. ».