Actualités 9 septembre 2020

Les producteurs bloquent la création de Semences Canada

La création de Semences Canada n’aura finalement pas lieu. En assemblée générale extraordinaire le 27 août, plus de 55 % des membres de l’Association canadienne des producteurs de semences (ACPS) ont rejeté la motion en faveur de la fusion de cinq associations du secteur des semences.

Au cours des dernières semaines, les quelque 3500 membres de l’ACPS étaient appelés à se prononcer sur l’éventuelle fusion de leur organisation avec l’Association canadienne du commerce des semences (ACCS), l’Association des analystes de semences commerciales du Canada (AASCC), l’Institut canadien des semences (ICS) et la Canadien Plant Technology Agency (CPTA).

La fusion avait pour but de créer une association nationale du secteur des semences qui inclurait l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur. Par le fait même, les pouvoirs réglementaires délégués par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) à l’ACPS en matière de certification des semences et de culture des semences allaient être transférés à la nouvelle entité.

Des cinq associations concernées par ce projet, seule l’ACPS s’est exprimée contre la création de Semences Canada. Les deux tiers des votes étaient nécessaires pour l’adoption du projet.

La directrice générale des Grains Semtech, Annie Bergeron, très impliquée dans le projet de fusion, s’avoue déçue par le résultat. « Cela fait plusieurs années que les normes de la production des semences ont été confiés aux producteurs. Peut-être avaient-ils peur de perdre leur voix dans la nouvelle association. »

Modèle de gouvernance critiqué

En fait, plusieurs producteurs avaient soulevé des inquiétudes concernant le modèle de gouvernance tel que proposé. Le premier conseil d’administration devait initialement se composer de 15 membres issus des associations de chaque région et de représentants de l’industrie pour un mandat de deux à trois ans. À la suite de quoi, le conseil était ramené à 11 administrateurs. Cependant, selon la convention de la fusion, les associations régionales de producteurs s’engageaient à modifier leurs règlements pour permettre l’adhésion d’organisations ou de personnes de l’ensemble de la chaîne de valeur.

Les Producteurs de grains du Québec, qui, tout en reconnaissant certains éléments positifs à cette fusion comme la plus grande capacité à développer de nouvelles variétés, avaient déjà partagé leur préoccupation quant à la perte d’influence des différentes associations de producteurs de semences.

Contactés quelques jours avant la tenue du vote, les Producteurs de semences du Québec ont fait savoir que leurs préoccupations rejoignaient celles des Producteurs de Grains du Québec et que son président, Martin Provencher, ne souhaitait pas s’exprimer davantage sur le dossier.

« Je trouve que dans ce projet, les producteurs étaient mis de côté. Si les producteurs ne s’impliquaient pas assez, l’industrie allait occuper trop de place », affirme pour sa part Danny Messier, producteur de semences et vice-président des Céréaliers du Québec.

Pendant les consultations qui précédaient le vote, le producteur a eu l’impression que certaines concessions avaient été faites par les promoteurs du projet sans pour autant rassurer totalement les agriculteurs. « Si un jour il y a fusion, il faudra arriver à un juste milieu entre les producteurs et l’industrie », ­précise M. Messier.

Annie Bergeron croit de son côté que les membres des différentes associations ont peut-être manqué d’informations pour se prononcer sur cet enjeu en toute connaissance de cause. « On sent que le modèle de gouvernance a provoqué des irritants, mais l’inconnu fait souvent peur. Je crois sincèrement que la création de Semences Canada aurait été bénéfique pour tous les acteurs du milieu. »

Plusieurs discussions sont à prévoir  prochainement entre les membres des quatre organisations ayant voté en faveur de la fusion à savoir si elles souhaitent poursuivre sans l’ACPS.