Actualités 13 septembre 2017

Bien gérer l’eau dans les champs

Les pluies diluviennes du printemps dernier ont fait ressortir un problème de gestion de l’eau dans plusieurs champs du Québec. Le coupable : la compaction, qui empêche un bon écoulement de l’eau. Pour y remédier, un travail en profondeur pourra aider à aérer le sol, mais cette solution doit être ponctuelle, notent les experts.

La gestion de l’eau dans le sol varie en fonction du type de production et du type de sol, lance d’emblée Pierre Beaudry, expert agronome retraité de l’Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe. « Des sols argileux vont sécher plus rapidement, alors que des sols avec une base de limon sécheront moins bien », dit-il. Il faut donc adapter le travail en fonction du type de sol, car il n’y a pas de solution unique pour tous les producteurs.

Pour les producteurs qui font du travail réduit du sol, cela signifie que certains sols qui sèchent moins rapidement devront être travaillés, du moins en superficie. C’est d’ailleurs la stratégie empruntée par Mathieu Pigeon, de la Ferme Agri G et M, dans les loams sableux. « Ça me permet de réchauffer le sol au printemps », dit-il. Résultat : l’eau s’évapore alors plus rapidement et la structure du sol favorise l’égouttement.

Quand survient un coup d’eau, il n’y a pas mille solutions, estime M. Beaudry. « Le sol doit être bien aéré, dit-il. C’est ce qui permet d’assurer l’humidité en période de sécheresse et de réduire la rétention de l’eau quand il y en a trop, comme ç’a été le cas le printemps dernier. »

Ennemi no 1 : la compaction

Lorsqu’un problème majeur de gestion de l’eau survient, la compaction du sol est souvent responsable. Pour régler un problème de compaction intense, Pierre Beaudry suggère d’utiliser une sous-soleuse à une profondeur de 25 à 30 cm. Mais attention, cette solution est un outil de gestion à court terme pour corriger un problème. « On ne peut pas travailler le sol en profondeur tous les ans, note l’agronome. Idéalement, il faudrait faire ce type de travail une seule fois, car on peut créer un problème de compaction plus en profondeur. » Un travail du sol en profondeur peut déstructurer le sol et lessiver les éléments nutritifs, ajoute l’expert.

Marc-Olivier Gasser, chercheur à l’institut de recherche et de développement en agroenvironnement (IRDA), abonde dans le même sens. « Le sous-solage peut aider le drainage interne du sol, mais c’est une pratique à double tranchant, car après quelques années, ce n’est pas une pratique qui amène des résultats probants. »

Lorsque les problèmes de compaction sont mineurs, il est préférable de travailler moins en profondeur, soutient Pierre Beaudry. L’utilisation d’une déchaumeuse ou de herses à disques permet également de travailler le sol de 3 à 5 cm de profondeur pour l’ameublir en surface, facilitant ainsi l’écoulement de l’eau. Pour des producteurs qui font du travail minimum, il est aussi possible de travailler en bande à une profondeur d’une dizaine de centimètres pour faciliter l’écoulement.

Optimiser le drainage de surface

Selon Marc-Olivier Gasser, les producteurs doivent aussi regarder le drainage de surface avant de travailler le sol en profondeur. « Il faut regarder où l’eau s’en va, car la meilleure solution passe parfois par le nivellement », ajoute l’expert.

La régie des cultures est aussi un élément important pour bien gérer les apports en eau, note Pierre Beaudry. « Les producteurs qui ont adopté de bonnes stratégies, avec des rotations plus longues, s’en sont sortis relativement bien le printemps dernier. »

Les producteurs doivent aussi revoir leurs pratiques pour réduire la circulation dans les champs à l’automne, lorsque le sol est humide, soutient Marc-Olivier Gasser.

Une autre option pour améliorer la gestion de l’eau : utiliser des engrais verts. « Les plantes ont une meilleure capacité d’évapotranspiration que le sol nu, note M. Gasser. Dès qu’il y a un peu de chaleur, elles permettent d’assécher les champs plus rapidement. » Sans compter que les plantes améliorent aussi la structure et la porosité du sol.

En bref, les engrais verts et le travail réduit permettent d’économiser du temps et de l’argent tout en conservant les sols, estime le chercheur de l’IRDA. « C’est la meilleure façon d’améliorer l’état hydrique du sol », conclut-il.