Actualités 6 avril 2017

Une deuxième chance pour les engrais à libération contrôlée

Une nouvelle étude d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) pourrait bien redonner ses lettres de noblesse à l’engrais à libération contrôlée (ELC) dans la culture de pommes de terre, même si l’agronome Gaétan Parent et ses collègues du Centre de recherche et de développement de Québec ont eu quelques difficultés à trouver des agriculteurs disposés à faire des essais.

« C’est que les ELC ne sont pas populaires du tout chez les producteurs de pommes de terre, explique M. Parent. Il y a des gens qui avaient essayé ça dans le passé et ils étaient arrivés à la conclusion que les ELC donnaient les mêmes rendements que l’engrais conventionnel. »

Les chercheurs ont finalement trouvé deux agriculteurs de L’Île-d’Orléans, un de Joliette et deux autres de Sainte-Brigitte-des-Saults, qui ont bien voulu donner une deuxième chance à cet engrais mal aimé.

Malgré un environnement variable, tous les champs à l’essai ont répondu de la même façon aux tests de l’équipe de recherche. « On a remarqué que si on réduit la dose d’ELC à 40 ou 50 kg d’azote à l’hectare, on a les mêmes rendements qu’avec 200 kg d’azote d’engrais conventionnel », affirme M. Parent.

En faisant varier la quantité d’azote utilisée, l’ELC et l’engrais conventionnel ont tous deux donné des rendements moyens de 30 tonnes de pommes de terre par hectare.

« On constate donc que les ELC sont meilleurs, parce qu’on peut en mettre moins et obtenir le même rendement », précise le chercheur.

Un avantage économique

L’avantage des ELC dans la culture de pommes de terre est avant tout économique.

« Contrairement au mythe, le prix des ELC est plus avantageux que celui des engrais conventionnels », souligne M. Parent.

Il parle d’environ 2 $ le kilo d’azote pour les ELC, contrairement à autour de 3 $ pour un engrais comme le sulfate d’ammonium, généralement utilisé par les producteurs de pommes de terre.

« Notre recherche montre qu’on peut mettre moins d’ELC que d’engrais conventionnels et, en plus, ils sont moins chers », explique-t-il.

Simple à appliquer

Le producteur qui utilise un ELC n’a pas à faire une deuxième application d’engrais quand vient le temps de renchausser la pomme de terre, puisque celui qui a été appliqué lors de la plantation n’aura pas été complètement libéré et lessivé.

« C’est beaucoup plus simple ainsi. On n’a pas besoin d’estimer la deuxième quantité d’engrais à appliquer selon la pluie qui est tombée en début de saison », illustre Gaétan Parent.

Le producteur devra toutefois ajuster ses formules d’engrais en conséquence, prévient le chercheur. « Sinon, il devra avoir deux boîtes à engrais. Une pour l’azote et l’autre pour le reste. »

Les essais réalisés par l’équipe d’AAC ont été faits sur des Goldrush. Gaétan Parent ne connaît donc que l’impact des ELC sur des pommes de terre destinées à un marché spécifique.

« Quel sera l’impact de l’utilisation d’urée quand on veut faire une croustille ou une frite? Malheureusement, la recherche qu’on vient de faire ne nous permet pas de généraliser, note-t-il. Je dis donc aux producteurs : faites des essais. Testez les ELC chez vous. »

Différents sols, même rendement

Étant donné que la membrane de polymère qui recouvre la granule d’urée prend de l’expansion en fonction de la température du sol, Gaétan Parent croyait que le type de sol aurait une incidence sur le rendement des ELC. Il a été surpris de constater que la teneur en eau du sol n’était pas un facteur déterminant. Dans les champs très secs de Joliette, les ELC ont donné un rendement similaire à ceux qui sont sableux et plus humides, à Sainte-Brigitte-des-Saults.

Contrôlée ou retardée?

Attention de ne pas mélanger les engrais à libération contrôlée et ceux à libération retardée. Alors que les ELC vont relâcher l’azote de façon graduelle tout au long de la saison de croissance, les engrais à libération retardée repoussent simplement la libération à plus tard. « Ça, quand ça part, ça part! On utilise ce type d’engrais dans la production fourragère, par exemple, ou la production de maïs pour réduire les pertes par volatilisation », explique M. Parent.

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