Portraits 26 juin 2023

Le secret d’une ferme de groupe

C’est en conjuguant entrepreneuriat et famille que les Champagne sont devenus Famille agricole de l’année en 2022. L’animateur du balado Le son de la Terre a rencontré l’un de ses représentants, Fred Martineau, pour discuter de l’approche différente de cette ferme (très) familiale. Voici un extrait de l’entrevue accordée par le producteur laitier.

Q  Comment est née la Ferme Champagne et Frères?

R  La Ferme Champagne et Frères a connu ses débuts en 1968 quand mes oncles Viateur, Boniface et Michel se sont associés. Dès le départ, c’était déjà une ferme de groupe. Ma génération à moi, on était cinq associés depuis 2002. Nous étions deux frères Martineau et trois frères Champagne, tous des ­cousins. Maintenant, nous sommes huit avec notre relève. Ce sont des fils, des neveux, qui sont petits-cousins entre eux. On peut dire qu’on est trois générations à se côtoyer à la ferme présentement.

Q Comment s’est passée l’intégration de la relève?

R  Les démarches se sont échelonnées sur deux ans environ. On a eu l’aide d’un consultant pour planifier l’intégration fiscale. Mais lui nous a suggéré de trouver quelqu’un pour nous accompagner dans l’aspect humain de tout ça. Il nous a fait comprendre que d’avoir un aussi gros groupe, avec une aussi belle ­harmonie, c’était quelque chose de précieux. En avril 2022, on a intégré à l’équipe une travailleuse sociale spécialisée dans le monde agricole. Nous avons des rencontres avec elle chaque mois et on ­travaille en prévention. Ce sont des rencontres en groupes, en sous-groupes et elle est même disponible pour n’importe qui dans l’entreprise, que ce soient des associés ou des employés qui auraient des besoins personnels, en lien avec la ferme ou avec la famille. C’est toujours la ferme qui prend la facture. C’est un service qu’on a décidé de s’offrir comme groupe, mais aussi comme grande famille.

Q De travailler tous ensemble, ça doit nécessiter d’être bon pour faire des compromis? 

R  Les compromis, ça fait partie du quotidien. De un, en agriculture, il faut en faire, des compromis, parce qu’il y a plein de choses qu’on ne contrôle pas, comme la météo. Mais chez nous, ça fait partie de la culture d’entreprise de faire des compromis. Quand on a remporté le titre de Famille agricole de l’année et que l’équipe de tournage est venue à la ferme, mon oncle a dit une phrase qui explique bien la ­dynamique qui règne ici : « L’idée de tout le monde est bonne et ce n’est pas toujours toi qui as raison. » Ça vaut la peine de discuter et d’écouter les idées de tout le monde. 

Q Comment ça se passe entre les générations?

R  Notre travailleuse sociale, Nancy Langevin, a été très habile l’an dernier. Nous étions en plein dans les discussions d’intégration à la ferme. Elle a voulu organiser des rencontres par génération. Le mois suivant, nous avons eu une rencontre tous ensemble. La discussion a été beaucoup plus facile parce qu’elle était là pour faciliter les échanges. Les gens osaient dire ce qu’ils avaient mentionné avant. Ça nous a fait réaliser à nous, les plus vieux, ce qui était important pour les plus jeunes. On a aussi compris qu’ils voulaient qu’on ralentisse, dans l’espoir de nous garder à la ferme le plus longtemps possible. Ils ne voudraient pas se retrouver avec toute cette entreprise-là, du jour au lendemain, à gérer. Nous, notre défi, c’est de réussir à faire comme nos oncles ont fait avant nous autres : réussir à se tasser assez vite pour laisser les plus jeunes prendre de l’initiative et plus de place dans les décisions. Je pense qu’on est bien partis, et si ça n’arrive pas assez vite, les jeunes vont trouver le tour, avec Nancy, de nous le dire.

Écoutez l’entrevue complète au laterre.ca/balado pour en savoir plus sur le petit village qui compose la ferme, sur les projets d’expansion et bien plus.