Page conseils 23 août 2023

Les insectes aussi tombent malades

La production d’insectes comestibles, tant pour l’humain que pour les animaux, offre une solution de rechange très riche en protéines et oligo-éléments. L’élevage d’insectes se traduit en de multiples bénéfices environnementaux. Il requiert moins d’espace et d’eau et génère considérablement moins de gaz à effet de serre, surtout lorsqu’ils sont nourris avec des sous-produits agroalimentaires. En effet, le surcyclage des résidus organiques à l’aide des insectes comestibles contribue à lutter contre le gaspillage alimentaire. Étant des animaux « à sang froid », ils sont aussi grandement efficaces en matière de conversion alimentaire, nécessitant moins de kilos de nourriture pour chaque kilo de protéines produites. Leurs bénéfices environnementaux sont des facteurs de motivation déterminants pour les consommateurs québécois. La plupart des éleveurs et transformateurs commerciaux d’insectes au Québec produisent des larves de ténébrion meunier, un coléoptère. 

En matière de santé animale, les producteurs d’insectes comestibles n’ont pas toujours accès à des services et outils de diagnostic et de traitement aussi développés que les éleveurs de mammifères, de volailles ou de poissons. Les biologistes, entomologistes, agronomes et écologistes sont impliqués depuis longtemps dans la recherche sur les insectes, mais ce sont les vétérinaires qui détiennent les compétences en matière de maladie dans les populations animales, de biosécurité dans les élevages et de salubrité des aliments. Il est donc primordial de développer une expertise vétérinaire dans cette discipline tout en renforçant les liens existant entre les différents intervenants. L’histoire nous rappelle durement le prix d’une biosécurité insuffisante lorsque des éclosions de grippe aviaire ou de grippe porcine surviennent.

Un nouveau projet de recherche vise à développer les connaissances sur le ténébrion meunier pour en faire bénéficier l’industrie. Un des objectifs du projet est d’abord de développer une expertise en entomopathologie chez cette espèce. La pathologie consiste à examiner les liquides, les cellules et les tissus d’un être vivant. Si elle est bien développée chez plusieurs autres espèces, des manques sont à combler en ce qui concerne les insectes. La création de données de base en pathologie du ténébrion meunier est nécessaire pour évaluer et suivre son état de santé en élevage. Puisque les bactéries, fongus et virus potentiellement pathogènes représentent une très grande menace dans les élevages, un autre objectif du projet est d’identifier les pathogènes spécifiques à cet insecte pour éviter les épidémies et l’effondrement des entreprises. Non seulement l’identification des agents pathogènes affectant le ténébrion meunier est à l’étude dans ce projet, mais la résistance de différentes souches de ténébrions à ces pathogènes est aussi explorée. 

Comme dernier objectif, le projet prévoit analyser l’impact des paramètres d’élevage comme la température, l’humidité et l’alimentation sur les taux d’infection des ténébrions meuniers par des pathogènes. Afin d’accroître l’immunité du ténébrion envers ces microorganismes, des probiotiques et des aliments fonctionnels seront également testés. Ainsi, les paramètres optimaux et l’alimentation qui permettent de minimiser les maladies et la mortalité dans les élevages seront connus. Dans quelques années, peut-être aurons-nous même des vaccins pour prévenir les maladies des ténébrions! 

Les bénéfices de ce projet seront grands. Les outils et les techniques qui seront développés aideront grandement les éleveurs pour assurer la pérennité de ce secteur en croissance. Nous vous mettons au défi de goûter à ces délicieuses petites bêtes aux multiples mérites écologiques et à saveur prometteuse pour le climat.